Ces dernières années, les étudiants ont montré qu’ils étaient capables d’être à l’initiative de puissants mouvements, comme par exemple lors de la grande lutte contre le CPE, en 2006. Depuis, chaque année a vu naître un mouvement étudiant d’envergure. C’est le signe d’une grande combativité, dans la jeunesse étudiante. Mais c’est aussi une réponse à l’intensification des attaques contre l’enseignement supérieur et la recherche.
Initiée sous le gouvernement Jospin et poursuivie par Jacques Chirac, puis Nicolas Sarkozy, cette série d’attaques a atteint son point culminant en 2008, avec le passage aux forceps de la loi LRU (Libertés et Responsabilités des Universités).
Cette année encore, Valérie Pécresse, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, tente d’imposer plusieurs contre-réformes, qui sont des applications directes de la LRU. Il s’agit notamment de la casse du statut des enseignants-chercheurs et du financement à la performance des universités. Ces mesures, si elles aboutissent, transformeront les universités actuelles en succursales des entreprises, destinées à accroître les profits à court terme des capitalistes. Ces contre-réformes feront basculer le domaine de l’enseignement et de la recherche dans le chaos du « marché libre ».
Cette fois-ci, ce sont les enseignants-chercheurs qui ont tiré la sonnette d’alarme en se mobilisant partout, en France, contre la casse de leur statut, qui jusqu’alors garantissait l’indépendance de la recherche à l’égard des intérêts des capitalistes. Cette indépendance est brutalement attaquée. Très rapidement, les étudiants leur ont emboîté le pas en avançant sur leurs propres mots d’ordre – abrogation de la LRU et augmentation des bourses, entre autres – tout en soutenant la mobilisation et les revendications de leurs professeurs. A l’heure où ces lignes sont écrites, près de 90% des universités sont en grève, et même des bastions historiques de la droite sont touchés par le mouvement, comme par exemple l’université de Lyon 3.
Face à l’ampleur de cette protestation et à la multiplication des foyers de contestation, dans le pays, le gouvernement cherche à reculer sans en avoir l’air. Après la nomination d’une « médiatrice » auprès des enseignants-chercheurs, il a reçu séparément leurs représentants et ceux des étudiants. Ce que le gouvernement redoute par-dessus tout, c’est la « contagion » du mouvement à la classe ouvrière, pour reprendre le vocabulaire de la droite. Le gouvernement semble donc prêt à lâcher du lest, dans l’espoir que le mouvement étudiant/professeur s’essouffle avant la journée du 19 mars. Ne soyons pas dupes ! L’annonce du gel des suppressions de postes pour 2010 et 2011, comme la promesse de réécrire le décret relatif au statut des enseignants-chercheurs, ne sont qu’une manœuvre visant à désamorcer la grève – pour mieux revenir à la charge, plus tard.
Les étudiants sont déterminés. Ils ont également acquis une grande expérience des mobilisations. Les Assemblées Générales, les commissions thématiques, la coordination nationale et la révocabilité des délégués sont des acquis organisationnels précieux, qui permettent une bonne participation démocratique des étudiants. Cependant, les travailleurs universitaires et les étudiants ne peuvent rester mobilisés indéfiniment. Nous savons bien que seule l’entrée en action du mouvement ouvrier fera plier la droite. Or, en fixant au 19 mars la nouvelle journée de mobilisation nationale, les directions confédérales des syndicats de salariés ont fait comme si les universités pouvaient « attendre » cette date, alors qu’elles sont dans l’action depuis plusieurs semaines.
Seule la convergence avec le mouvement des travailleurs, sur des revendications offensives, poussera les étudiants à entrer encore plus massivement dans la lutte contre le gouvernement et sa politique réactionnaire. La grève générale en Guadeloupe montre qu’il est possible de construire un tel mouvement, lorsque les directions syndicales s’en donnent les moyens. La journée de grève du 19 mars pourrait être l’occasion de lancer ce mouvement massif. En attendant, un seul impératif : poursuivre la lutte et construire l’unité des étudiants et des salariés.