L a journée d’action du 11 octobre contre l’austérité, à laquelle appelait la direction confédérale de la CGT, n’a pas été un franc succès. Certes, les manifestations étaient nombreuses, mais la mobilisation ne s’est pas étendue très au-delà de la couche la plus active des militants syndicaux. Et pourtant, dans les entreprises et la fonction publique, la colère est palpable. Une analyse superficielle de la situation pourrait faire penser que la population se résout finalement à accepter les mesures de rigueur dont elle fait les frais, par « réalisme » comme le disent les capitalistes. Nous ne pensons pas que ce soit le cas. Dès lors, comment expliquer cet écart entre la colère des travailleurs et ce faible niveau de mobilisation ?
Premièrement, la direction confédérale de la CGT n’a pas explicitement appelé à la grève. Dans son tract du 22 septembre adressé à toute l’organisation, elle « pense indispensable de mettre à disposition toutes les modalités possibles, dont la grève ». Il est heureux qu’à l’heure où les capitalistes imposent aux salariés une austérité sans précédent, la direction de la CGT pense indispensable d’envisager la possibilité d’une grève. Seulement, l’heure ne doit plus être seulement à l’envisager, mais à l’organiser sérieusement et à expliquer qu’il n’y a pas d’autres « modalités » d’action contre le patronat et le gouvernement. Faute d’un mot d’ordre de grève clair, l’affaire était bien mal engagée.
Deuxièmement, les salariés ont fait l’expérience, ces dernières années, des limites des « journées d’action » sans lendemain, notamment lors de la grande lutte contre la casse des retraites, à l’automne 2010. Au vu de ces expériences récentes, comment la direction de la CGT entendait-elle mettre en échec la politique de rigueur, cette fois-ci ? On n’en sait strictement rien. Les tracts et autres notes qui émanent de la direction confédérale se limitent à inscrire les journées d’action « dans un processus de mobilisation dans chaque entreprise ». Certes, aucun militant syndical sérieux ne demandera que tout le travail soit fait « d’en haut ». Chacun connait la nécessité du travail à la base, au contact des salariés. Mais ce n’est pas suffisant. Contre la politique réactionnaire du gouvernement, il faut une contre-attaque de l’ensemble des salariés. Et pour cela, il faut que la direction confédérale propose et organise cette lutte. A défaut, les salariés ne verront pas l’intérêt qu’il y a à perdre une énième journée de salaire.
Dans le même tract du 22 septembre, il était écrit que le 11 octobre permettrait « de dire puissamment, ensemble, au patronat et au gouvernement : ça suffit ». Or, il y a bien longtemps maintenant que les salariés ne veulent plus simplement dire qu’ils en ont assez. Ils veulent agir, en conscience, pour améliorer leurs conditions d’existence. La faible mobilisation du 11 octobre ne provient pas d’un manque de combativité et de conscience de la part des salariés. Elle s’explique par une stratégie des directions syndicales qui sont en retard sur la situation objective, au lieu d’en être à l’avant-garde. Les « points d’appui » et autres « modalités » sont une perte de temps éprouvante pour les salariés. Il faut préparer sérieusement une grève interprofessionnelle illimitée pour défendre les intérêts des salariés et s’opposer à l’austérité. En amont, une vaste campagne d’agitation doit être lancée par la direction confédérale pour expliquer la gravité des attaques qui nous attendent, du fait de la crise. Et il faut une direction confédérale qui se décide enfin à préparer cette bataille.