A Toulouse, l’agence Pôle Emploi de la place Occitane est menacée de fermeture. C’est la seule agence du centre-ville. La décision de la fermer pose de nombreux problèmes – et a entraîné la mobilisation de ses salariés.
Ces derniers ont appris la nouvelle en novembre 2020, par visioconférence. Leur agence Pôle Emploi est l’une des huit agences que compte Toulouse. L’intégralité de ses services serait délocalisée à l’agence de la Cartoucherie, qui est très excentrée et compte déjà près de 70 agents pour 12 000 demandeurs d’emploi, comme le souligne l’intersyndicale Pôle Emploi dans un communiqué.
L’agence Pôle Emploi Occitane compte une quarantaine de salariés, parmi lesquels une dizaine d’agents s’occupent de 4500 demandeurs d’emploi. Mais les deux tiers environ de ces milliers de demandeurs ne relèvent pas, géographiquement, de l’agence Occitane. En effet, chaque demandeur d’emploi peut se rendre dans l’agence de son choix, et l’emplacement de l’agence Occitane, en centre-ville, en fait un véritable service public de proximité.
Le maintien de cette agence en centre-ville paraît donc logique, du point de vue de l’intérêt des chômeurs. Mais cette logique semble échapper à la direction locale de Pôle Emploi, qui lui en préfère une autre : la logique financière. Pour justifier son choix, elle met en avant des raisons de sécurité : l’immeuble est ancien, beaucoup de travaux sont à faire, et l’agence ne dispose pas d’un accès pour personnes à mobilité réduite. Les salariés ne le contestent pas. En fait, les syndicats demandent depuis de nombreuses années que l’agence soit relogée ailleurs dans le centre-ville. Cependant, la direction prétend n’avoir pas trouvé de locaux correspondant au loyer qu’elle est prête à payer (et dont les salariés ignorent le montant), sans en fournir la preuve. En réalité, comme nous le confie une salariée de l’agence Occitane, la direction ne cherche plus de nouveaux locaux depuis deux ans.
De graves conséquences
Cette délocalisation aurait de nombreuses conséquences négatives. L’agence Occitane est en lien direct avec le Centre communal d’action sociale (CCAS) de Toulouse : elle s’occupe notamment du suivi Pôle Emploi des personnes bénéficiant des services du CCAS. L’agence Occitane travaille également avec l’APIAF, une association toulousaine dont les principales missions sont l’accueil et l’encadrement des femmes victimes de violences conjugales. En délocalisant les services que ces femmes reçoivent, on multiplie les risques qu’elles se retrouvent face à face avec leur agresseur, nous explique le syndicaliste Emmanuel M’Hedbi (SNU-FSU).
Avec la fusion des agences, le public qui fréquentait l’agence Occitane n’aura pas d’autre choix que de parcourir de plus longues distances pour être suivi par un agent, alors même que l’heure est à la digitalisation du métier de conseiller Pôle Emploi : les agents doivent accomplir de plus en plus de tâches en ligne, tout comme les demandeurs d’emploi, qui ne sont pas tous familiers de l’informatique.
Les salariés de Pôle Emploi à Toulouse ne sont pas dupes. Ils ont compris que le but de leur direction est de fusionner plusieurs sites en un seul pour créer des structures plus importantes, mais moins accessibles. Ils ont pu observer ce type de refonte dans d’autres villes de la région, comme Carcassonne ou Montpellier. Dans cette dernière, il n’y a plus que deux gigantesques agences Pôle Emploi. Partout, la logique est la même : éloigner les services publics du public lui-même, au nom de considérations financières et immobilières. A Toulouse, l’exemple de l’hôpital La Grave est éloquent : la banque Kaufman & Broad a entrepris la construction, à proximité de ce site, d’un complexe hôtelier de luxe qui menace de reléguer les services de santé du quartier (notamment la santé sexuelle) au CHU, en périphérie de la ville.
Mouvement de grève
La nouvelle de la fermeture programmée a rapidement débouché sur une mobilisation syndicale. Les salariés mobilisés se sont accordés pour se mettre en grève à partir du 4 mars. Ils sont environ 60 % de grévistes dans l’agence. Ils ont interpelé la Mairie et le Conseil départemental. Ils ont été reçus par l’adjointe au maire en charge de l’emploi. Difficile, pour eux, de savoir à quoi s’attendre : officiellement, aucune décision n’a été prise, et aucune date n’a été arrêtée pour la fermeture, qui paraît pourtant inévitable à une des salariés que nous avons rencontrés. Derrière les manœuvres de sa direction, cette conseillère Pôle Emploi dénonce la fusion et la privatisation des services publics.
Ce mouvement de grève est soutenu par de nombreux syndicats et organisations de gauche. La fermeture de l’agence Occitane est loin d’être une exception. Ce qui est à l’œuvre avec la destruction progressive des services publics, ce sont des politiques d’austérité que la bourgeoisie met en place pour faire payer à notre classe la crise du capitalisme. L’ensemble du secteur public est confronté à des fusions, des fermetures et des dysfonctionnements en tout genre. Cette situation ne fera qu’empirer et nous devons la combattre.