Nous publions ci-dessous la déclaration faite par la CGT au Comité de Groupe de Crédit Agricole SA pour saluer le départ de Mrs CARON (Président) et PAUGET (Directeur). Elle a été distribuée et lue à l’AG des actionnaires, le 19 mai 2010. Merci à Alain Babin, délégué national de la CGT Crédit Agricole, de nous l’avoir transmise.
La CGT ne peut laisser les Dirigeants quitter la tête du Groupe Crédit Agricole sans les interpeller sur leurs responsabilités dans les crises que nous subissons, qu’elles soient agricoles, sociales ou financières.
Eblouis par les milieux financiers, emportés par le goût du pouvoir et de la puissance vous avez sacrifié les valeurs de bon sens et de proximité qui ont servi de socle au développement du Crédit Agricole. Vous avez dévoyé les valeurs mutuelles fondatrices du Crédit Agricole à tel point que pour vous dédouaner, vous êtes contraints de communiquer sur des ersatz, comme les « points passerelle » ou encore la Grameen Crédit Agricole Micro finance Foundation, à l’instar des pénitents d’hier contraints d’acheter des indulgences pour expier leurs péchés.
Ainsi, à coups d’appels de fonds successifs, d’abord pour satisfaire au culte de la taille critique avec des acquisitions chèrement payées, ensuite pour écoper en catastrophe les pertes abyssales de Calyon et éviter le dépôt de bilan d’EMPORIKI, vous avez ponctionné les fonds des Caisses Régionales patiemment accumulés pour donner du carburant à la spéculation financière et les détourner de leur objet social. En un temps record, vous avez occasionné 12 milliards de pertes, en sacrifiant les valeurs mutualistes au mirage de la spéculation immobilière US, l’équivalent de 5 ans de salaires pour les 66000 salariés des Caisses Régionales.
En 2007, devant les analystes et la presse spécialisée, vous snobiez les résultats de la banque de détail et de proximité (CR et LCL) qui ne dégageaient qu’une rentabilité de seulement 7 à 8 %. Vous avez même laissé entendre qu’il restait des gains de productivité à réaliser par la réduction de charges dans les Caisses Régionales. Or quand vous parlez de réduction de charges, nous savons, que c’est toujours au détriment des salariés.
La crise des Subprime, fruit de la spéculation, n’a pas tardé à vous rattraper et vous n’avez dû votre salut qu’aux résultats de la banque de détail (CR et LCL). En 2009, les résultats sont encore à mettre au crédit de la banque de détail, d’une part par sa contribution directe au résultat, et d’autre part dans les commissions reversées aux filiales pour les produits qu’elle distribue pour leur compte.
En quelques années vous avez transformé les Caisses Régionales, de banques de plein exercice en de simples entreprises de distribution. Vous avez par la même occasion trahi la confiance des sociétaires et des clients et exposé les salariés de proximité à la colère de ceux-ci, justifiée par les tarifications en perpétuelle augmentation, les ventes sans qualité, l’arrogance et l’irresponsabilité des dirigeants.
Vous évoquez la fatalité de la crise pour vous exonérer de vos responsabilités. A chaque étape, la CGT, les archives en témoignent, vous a suffisamment mis en garde et demandé de revenir aux fondamentaux. Nous n’acceptons pas que vous puissiez continuer à vous dérober devant vos responsabilités et que vos départs soient salués dans un climat d’auto congratulations indécentes.
Vous avez pris une entreprise solide en plein développement interne. En vous détournant de son objet social, vous laissez une belle façade avec des trous, des pertes isolées dans une structure de cantonnement, des salariés dévalorisés, qui expriment leur mal être et enfin des clients en mal de confiance, scandalisés par l’impunité des responsables de la crise. Par quel déni de démocratie avez-vous pu entrainer les administrateurs, garants de l’objet social coopératif mutualiste du Crédit Agricole, voué au développement du monde rural et des territoires, à s’empêtrer dans la haute finance du système financier anglo-saxon corrompu et prédateur.
Comment osez-vous signer une charte des droits humains quand le Crédit Agricole en 2007 recensait 115 filiales dans les paradis fiscaux, grands lieux de délinquance financière et de blanchiment d’argent sale ?
Nous attendons de la nouvelle équipe qui a pris les rênes du groupe qu’elle tire les leçons d’une telle débâcle et qu’elle puise dans un retour aux sources les moyens de rebondir, en donnant toute leur place aux salariés du Crédit Agricole et à leurs représentants. L’industrialisation, le système d’information unique, B for Bank, ou encore la réduction des effectifs de proximité ne laissent augurer rien de bon, pas plus que le plan stratégique que vous comptez réaliser en juillet.
Le Crédit Agricole déploie des moyens de communication démesurés, tant en interne qu’en externe. Mais ce sera toujours en pure perte dès lors que la pratique contredit la communication. Il ne suffit pas, de mettre en avant le sociétariat ou le nombre d’administrateurs si l’on prive ces instances de droits au débat contradictoire et que l’on fabrique le consensus par l’orchestration des cooptations.
Quant aux salariés, ils sont producteurs de la richesse de l’entreprise, ils sont les acteurs de son développement. A ce titre, ils doivent disposer des moyens d’exercer un contrôle sur les stratégies de l’entreprise, en toute transparence et en toute indépendance sans être soumis aux pressions de toutes sortes comme les menaces de sanctions ou encore la discrimination exercée à l’encontre de certains représentants syndicaux, pratiques fort courantes au sein du groupe CA, pour les femmes et les hommes qui s’opposent au capitalisme.
Le respect de valeurs éthiques, humaines et mutuelles est à ce prix.
Pour le collectif CGT crédit agricole, le délégué national, Alain BABIN