Le jeudi 1er mars, Nicolas Sarkozy annonçait sur France Inter que la direction d’ArcelorMittal, leader mondial de la sidérurgie, allait investir 17 millions d’euros dans le site lorrain de Florange, dont les deux hauts-fourneaux sont à l’arrêt depuis octobre 2011. Au terme d’une « longue réunion de travail avec Lakshmi Mittal », le PDG du groupe, ce dernier aurait accepté de débloquer cette somme « à la demande de l’Etat français » – comprenez : sur injonction de Nicolas Sarkozy. Et le président d’ajouter : « Je vous rappelle que Florange, c’est 2 667 salariés dont 500 en situation de perdre leur emploi si le haut-fourneau ne repart pas ». Sarkozy prétend (à tort) qu’une partie des 17 millions d’euros sera mobilisée afin de relancer l’un des deux hauts-fourneaux.
Le cynisme de cet individu n’a décidément aucune limite. Sous son quinquennat, le pays a battu tous les records de fermetures, de plans sociaux et de délocalisations, notamment dans le secteur industriel. Jusqu’à très récemment, « l’Etat français » n’y trouvait rien à redire. Aucune « longue réunion » n’était organisée. Seule comptait la course aux profits. Lorsque les grands capitalistes jugeaient qu’une entreprise n’était pas assez rentable, même en soumettant ses salariés à une exploitation brutale, ils la fermaient comme une boite d’allumettes. Cette dure réalité du système capitaliste, Nicolas Sarkozy la trouve juste et bonne. Pendant cinq ans, il a tout fait pour accroître les profits des grands seigneurs de la finance et de l’industrie, au détriment du plus grand nombre.
Mais à la veille de l’élection présidentielle, il lui faut de nouveau se déguiser en héros des pauvres et des travailleurs. Le voilà donc embarqué dans une frénétique tournée des entreprises menacées – avec, chaque fois, l’annonce d’une « décision » qui « sauve des emplois ». Il cherche à tirer un bénéfice électoral de la casse industrielle, ce qui est bien dans sa mentalité de charognard. Lors de l’interview sur France Inter, il a tenu à dresser un premier bilan de son activisme industriel : « Ce sont des décisions concrètes, comme pour Petroplus, comme pour PhotoWatt, comme pour Lejaby [...], comme pour Alstom ».
« Ça c’est du concret », répète-t-il. Mais en réalité, il n’y a précisément rien de concret. Les travailleurs « sauvés » ne sont pas dupes, d’ailleurs. Dans une interview àL’Expansion, le délégué CFDT du site de Florange explique : « tout ça, c’est de la gesticulation politique pour tenir jusqu’à l’élection présidentielle ». Il ajoute : « La direction d’ArcelorMittal a tout de suite tempéré les propos [de Sarkozy], conditionnant l’éventuel redémarrage des hauts-fourneaux au deuxième semestre à la reprise économique. C’est ce qu’ils nous disent depuis six mois. […] Cet investissement de 17 millions d’euros sur Florange était déjà prévu de longue date par Mittal ». Ainsi, conformément à une méthode éprouvée, Sarkozy s’est encore attribué les mérites d’un « succès » auquel il n’a strictement pas contribué – et qui, en l’occurrence, n’en est même pas un.
Les salariés des entreprises concernées par l’interventionnisme de Sarkozy ont tout intérêt à rester mobilisés. Les grands patrons qui se prêtent à cette manœuvre le font sans doute avec l’espoir que l’actuel président de la République – qui les a tant choyés – sera réélu le 5 mai prochain. Mais une fois les élections passées, quel qu’en soit le résultat, ils n’hésiteront pas à rayer d’un trait de plume leurs engagements de la veille. On entendra à nouveau parler d’emplois menacés non seulement à Florange, mais aussi à Petroplus, Photowatt, Lejaby, Alstom et ailleurs. Avec la crise, la casse de l’industrie va se poursuivre, du moins tant que les capitalistes en conserveront le contrôle.