Si le but du remaniement, annoncé il y a six mois, était de donner un « nouveau souffle » au gouvernement et à Nicolas Sarkozy, c’est évidemment raté. Le maintien de Fillon traduit avant tout l’affaiblissement de Sarkozy, non seulement dans les sondages, mais aussi dans son propre camp. Sortir Fillon du gouvernement l’aurait affaibli davantage. Ceci étant dit, ce remaniement ne change rien. La politique du nouveau gouvernement, comme celle du précédent, répondra exclusivement aux intérêts de la classe capitaliste.
Le départ des « centristes » ne marque pas un « virage à droite » du gouvernement. Borloo et Morin sont comme les autres. Borloo est « en révolte » contre Sarkozy parce qu’il n’a pas été nommé à la place de Fillon. Dans le cas contraire, il aurait couvert le même Sarkozy de louanges. La tentative de présenter les soi-disant « centristes » sous une lumière favorable n’est pas innocente. On se souvient de la grande campagne médiatique en faveur de Bayrou, lors des élections de 2007. A l’époque, Ségolène Royal avait recherché une alliance avec Bayrou. Elle lui aurait même proposé le poste de premier ministre, en cas de victoire. Cette orientation droitière de la candidate socialiste a favorisé Sarkozy. Et cette fois-ci encore, Royal a immédiatement « tendu la main » aux centristes qui, la veille, étaient avec Sarkozy.
La seule chose qui oppose les différentes cliques politiques, au sein de la droite, c’est l’ambition et la soif de pouvoir. Par exemple, de Villepin attaque Sarkozy. Il dit que l’actuel président est « l’un des problèmes de la France ». Nous sommes parfaitement d’accord. Mais de Villepin en est un autre. N’est-il pas ce défenseur acharné des intérêts capitalistes qui, en 2006, a voulu imposer le CPE, dont le but était de réduire les jeunes travailleurs à un statut à peine meilleur que celui d’esclaves, les patrons pouvant les licencier à tout moment sans la moindre justification ?
Les capitalistes et leurs créatures parlementaires n’offrent aucun avenir digne de ce nom à la masse de la population. La lutte contre la droite doit se poursuivre, sur le plan syndical et politique. De nouvelles luttes syndicales nous attendent. La réforme des retraites faisait partie d’une offensive générale contre les droits et les conditions de vie des travailleurs. En même temps, beaucoup de travailleurs espèrent que les élections de 2012 leur permettront de se débarrasser de la droite. Or, ce n’est pas du tout gagné d’avance. Les graves carences politiques de la direction du PS pourraient une fois de plus permettre à la droite de passer, comme en 2007.
Mais même si les socialistes remportent les élections présidentielle et législatives, ce ne serait qu’une étape dans notre lutte. Chassés des Ministères, les capitalistes – dont Sarkozy n’est qu’un représentant parmi bien d’autres – conserveront le contrôle des Conseils d’Administration des banques et des entreprises. La Bourse continuera de spéculer sur la destruction de l’emploi et des conquêtes sociales. Les fermetures et les délocalisations se poursuivront. Les amis des capitalistes tiendront encore les préfectures et les postes clés des échelons supérieurs de l’Etat. Ils tiendront toujours la presse et l’industrie audiovisuelle. Non, un changement de gouvernement ne suffira pas. Ce qu’il faut, c’est un changement de système. On peut retourner le problème dans tous les sens, la même conclusion s’impose : le chômage, l’exploitation et les innombrables oppressions et injustices que nous inflige le capitalisme resteront sans solution tant que la propriété capitaliste sera considérée comme inviolable. L’abolition du capitalisme, c’est-à-dire la nationalisation des banques, des organismes de crédit, des sociétés immobilières, de l’industrie et de la grande distribution – et le contrôle effectif de l’économie et de l’Etat par les travailleurs : voilà comment nous pourrons en finir avec le cauchemar capitaliste.