Le personnel de la Protection Maternelle et Infantile (PMI), dans le secteur médico-social, réalise des missions autour de la petite enfance et de la santé des femmes. Mais face à l’urgence actuelle, le pôle santé des Flamants – dans lequel je travaille – affiche désormais : « PMI - Centre de vaccination Covid ». C’est le seul centre de vaccination au cœur des quartiers Nord de Marseille.
Le centre des Flamants avait déjà été mobilisé lors de la pandémie de grippe H1N1 (hiver 2009-2010). La campagne vaccinale – de grande ampleur – avait marqué les équipes. Les conditions de vaccination étaient dégradées et le personnel épuisé par les heures supplémentaires. A la fin, la direction départementale les avait rétribués d’un simple « merci ».
D’importantes leçons ont été tirées de cette expérience. Le personnel exige désormais une prise en charge de qualité, une véritable sécurité sanitaire et de bonnes conditions de travail.
Des conditions indispensables
Dans un premier temps, la direction départementale a formulé les directives suivantes : 1) La continuité des missions spécifiques des équipes de PMI ; 2) Cinq demies-journées par semaine dédiées à la vaccination Covid ; 3) Des rendez-vous toutes les 6 minutes (soit 10 personnes vaccinées par heure) ; 4) Une « surveillance » post-vaccinale de 15 minutes, mais sans personnel dédié à cette mission ; 5) Une trousse d’urgence limitée à de l’adrénaline.
En réunion d’équipe, toutes ces directives ont été passées au crible. Dans la foulée d’une réflexion collective, les infirmières, les puéricultrices et les médecins ont unanimement adopté comme conditions sine qua non : 1) Un médiateur – si possible un professionnel de santé – affecté à la surveillance post-vaccinale ; 2) Une trousse d’urgence adéquate comportant, en plus des ampoules d’adrénaline, un tensiomètre et un lecteur de glycémie (au minimum) ; 3) Des rendez-vous toutes les 15 minutes, dans un premier temps, puis au maximum six vaccinations par heure ; 4) La réalisation préalable d’importants travaux de salubrité : ménage, chauffage et peinture.
Nous avons eu gain de cause sur toute la ligne. La première demi-journée de vaccination, le 22 janvier dernier, a démontré que nos conditions étaient indispensables. Un tout nouveau public, souvent très âgé, devait être pris en charge. Nous avons pu répondre correctement aux inquiétudes et aux questions concernant la vaccination, tout en garantissant le temps nécessaire à l’information et aux éventuels effets secondaires. Nous avons accueilli dignement, écouté et vacciné dans de bonnes conditions sanitaires, avec une consultation pré-vaccinale adaptée et une surveillance adéquate. Les difficultés rencontrées, par exemple une crise d’angoisse ou un retard d’ambulance, ont été facilement résolues, dans une ambiance détendue.
Pénuries de doses et de personnel
Malheureusement, les tentatives de prendre un rendez-vous se soldent souvent par le message automatique : « En raison d’une très forte demande et d’un stock limité de vaccins, tous les rendez-vous ont déjà été pris. Des disponibilités apparaîtront prochainement. Réessayez dans quelques jours ou cherchez un autre centre. » Ce n’est pas un cas isolé : dans le département des Bouches-du-Rhône, seuls 27 établissements de vaccination Covid sont ouverts, pour plus de deux millions d’habitants.
Au centre des Flamants, près de 200 vaccinations sont programmées en février. Trois demi-journées par semaine seront dédiées à la vaccination Covid. Si la direction a vite renoncé aux cinq demi-journées hebdomadaires, c’est parce qu’elles sont totalement incompatibles – en l’état actuel des choses – avec la continuité de nos missions spécifiques. Les difficultés d’accès à notre service public se sont déjà nettement accrues depuis le mois de mars dernier. Par exemple, dès le premier confinement, nous avons pris du retard sur les bilans de santé dans les écoles maternelles. Les troubles psychiques et la sédentarité augmentent fortement dans les familles, ce qui décuple le besoin de soutien et d’accompagnement. Au centre, les consultations pour assurer le suivi et la vaccination des nourrissons sont saturées depuis longtemps, sur plusieurs mois.
En fait, même avec cinq demi-journées consacrées à la campagne vaccinale, la politique générale face à la pandémie serait insuffisante. Et à cela s’ajoute la menace de pénurie de doses. A deux pas de Marseille, la campagne vaccinale de La Ciotat a été reportée de plusieurs semaines, faute de vaccins disponibles !
Pour vacciner l’ensemble de la population le plus rapidement possible, il faudrait résoudre le problème de pénurie de doses et le problème de manque d’effectifs. Ce n’est pas pour rien que des milliers de travailleurs de la santé et du médico-social descendent régulièrement dans la rue, comme ce fut encore le cas le 21 janvier dernier.
A l’échelle du pays, la CGT dénombre 100 000 postes manquants dans le secteur médico-social, 200 000 dans les EHPAD et 100 000 dans les hôpitaux. Pendant ce temps, plus de 20 % des jeunes sont au chômage…