Nicolas Sarkozy se dit « absolument certain que l’économie est en train de repartir ». Le nombre de chômeurs ne cesse d’augmenter. Les entreprises suppriment des emplois, délocalisent ou ferment. Les retraites subissent une nouvelle attaque. La production stagne toujours. L’investissement s’effondre. Le secteur agricole plonge dans une crise profonde. Dans les hôpitaux, les écoles et au Pôle Emploi – où le président était de passage, lorsqu’il a fait cette déclaration – la situation se dégrade. Mais naturellement, rien de tout ceci est de nature à entamer l’optimisme du chef de l’Etat !
Toujours au Pôle Emploi, dans le Val d’Oise, Sarkozy a assuré au personnel que le gouvernement « ne laissera personne au bord de la route. C’est mon devoir, nous ne laisserons personne sans rien ». Un détail semble avoir échappé au petit nerveux de l’Elysée : des centaines de milliers de personnes sont déjà sans rien, et des millions d’autres n’ont presque rien. Dans ce pays qui regorge de richesses, où les milieux capitalistes vivent comme des rois – non, mieux que des rois ! –, huit millions de personnes sont officiellement classées comme pauvres. Le vrai chiffre est sans doute beaucoup plus élevé. Et il augmente avec chaque jour qui passe.
Il n’est pas impossible que le PIB se remette à croître légèrement, à court terme. Mais ceci n’apportera rien aux travailleurs de ce pays. La réalité du système capitaliste, à notre époque, c’est que la croissance de la production se fait au détriment des salariés – et que la baisse de la production leur porte des coups encore plus durs. Une légère reprise pourrait bien n’être que le prélude à une nouvelle chute, plus grave encore que la précédente. C’est qu’une bombe à retardement plane sur l’économie française et sur l’économie européenne en général, une bombe qui ne manquera pas d’exploser à un moment donné. Il s’agit de la dette publique colossale, qui en France s’élève désormais à 1500 milliards d’euros, soit l’équivalent de 80% du PIB annuel.
Les Etats sont constamment sollicités pour colmater les brèches de l’économie capitaliste, à coups de subventions et d’opérations de sauvetage au profit de banques et d’entreprises. De manière générale, le marché est artificiellement stimulé par une injection de fonds massive – et bien supérieure aux ressources dont les gouvernements disposent. D’où la croissance exponentielle de l’endettement public. En Grèce, cet endettement a mené à la quasi-faillite de l’Etat, qui s’est trouvé dans l’impossibilité de lever les fonds correspondant à ses engagements. Le Portugal, l’Irlande et l’Espagne ne sont pas loin de faire face à la même situation. A terme, l’Etat français n’est pas à l’abri d’une telle débâcle.
La seule façon d’éviter la faillite serait d’imposer une politique de rigueur draconienne – beaucoup plus sévère que ces dernières années – et d’augmenter massivement les impôts. Or, ces deux options entraîneraient une contraction brutale de la demande intérieure et précipiteraient l’économie dans la récession. Le remède serait pire que mal. Mais en même temps, laisser filer la dette mènerait tout aussi sûrement à la débâcle. La France a été mise à contribution pour éviter l’effondrement de la Grèce – non par solidarité, mais parce que les capitalistes français et allemands craignaient un « effet domino ». Cependant, qui sauverait la France ?
On le voit bien, l’optimisme de Monsieur Sarkozy n’est pas justifié. Mais en essayant de semer de faux espoirs, il est parfaitement dans son rôle. A défaut de fournir un avenir digne à la masse de la population, les représentants du capitalisme ne peuvent leur offrir que des leurres et des subterfuges. Aucune solution ne viendra de la politique économique du gouvernement, qui ne maîtrise pas grand-chose, de toute façon. Le vrai gouvernement de la France se trouve à la Bourse, au MEDEF et dans les Conseils d’administration des grandes entreprises capitalistes. Pour sortir de cette impasse, il ne faut pas compter sur ceux qui en sont la cause. La solution ne peut venir que de notre classe.
Les représentants les plus sérieux de la classe dirigeante craignent que les travailleurs parviennent à cette conclusion. Par exemple, dans son édition du 16 avril dernier, Direct Matin a publié une interview d’Eric Woerth. A la question : « Quelle sont les craintes du gouvernement ? », le ministre du Travail a répondu : « Que la conjonction du dépôt au Parlement en septembre du projet de loi sur les retraites et du projet de loi sur les finances pour 2011, avec son cortège de suppressions d’emploi, ne suscite un mouvement social du type de celui de 1995. »
Un mouvement de grève illimité aussi puissant que celui de 1995 serait, en effet, une réponse beaucoup plus sérieuse que des manifestations ponctuelles qui n’impressionnent personne. Mais la lutte contre les capitalistes et leurs représentants politiques exige non seulement des actions de grande envergure, mais aussi et surtout un programme et un but clairs. C’est dans ce domaine que le PCF peut et doit jouer un rôle majeur, voire décisif. Notre parti doit s’efforcer de fixer l’attention des travailleurs – à commencer par les éléments les plus combatifs – sur le but à atteindre.
N’oublions pas que la grève de 1995, malgré son ampleur, n’a rien résolu de fondamental. Les attaques contre les conquêtes sociales du mouvement ouvrier n’ont jamais cessé, depuis. La tâche historique des travailleurs est de s’emparer du contrôle de l’économie et d’organiser la société sur de nouvelles bases, des bases socialistes. Il faut abolir la propriété capitaliste, qui constitue le fondement de l’exploitation de l’homme par l’homme. Sous le contrôle démocratique des travailleurs, les gigantesques ressources du pays seront au service de l’immense majorité de la population. Les fléaux du capitalisme – le chômage, la pauvreté, les inégalités flagrantes, le pouvoir arbitraire des exploiteurs – seront enfin éradiqués. Le marché sera remplacé par une planification rationnelle de la production et de la distribution. Voici le but des communistes. Luttons pour qu’il soit celui de l’ensemble de notre classe.