Le 3 septembre dernier, une cinquantaine de militants de l’Union locale des syndicats CGT de l’aéroport de Roissy se sont réunis pour définir une stratégie, après la publication d’une circulaire du ministère du travail, le 3 juillet 2009, relative à la pandémie grippale. Les débats ont été introduits par les interventions d’un médecin urgentiste de la CGT Santé et d’un militant de la CGT de l’inspection du travail.
Le camarade urgentiste a expliqué qu’on faisait face à un cas classique d’instrumentalisation par la peur. Il reconnaît que le virus est susceptible de toucher un grand nombre de personnes. Mais il écarte tout risque d’hécatombe similaire à la « grippe espagnole », compte tenu des avancées sanitaires. Il s’interroge sur le système d’alerte des gouvernements. La menace d’une alerte de « phase 6 » – la phase de pandémie – n’a rien de médical. C’est un choix politique. Son déclenchement servirait à faire pression pour imposer une dégradation des conditions de travail. Par ailleurs, on ne peut pas sérieusement écarter le mobile d’un « soutien » aux multinationales de l’industrie pharmaceutique, qui ont amassé des milliards d’euros en commandes de vaccins, à travers le monde.
Notre camarade urgentiste connaît les difficiles conditions de travail, à l’hôpital, faute de moyens suffisants : « 20 000 suppressions de postes dans les hôpitaux, en 2009 ! Si on a une catastrophe sanitaire, ce sera par manque de personnels et de moyens ! Un exemple : début juillet, au SAMU de Bobigny, il n’y avait déjà plus de gel hydroalcoolique pour se laver les mains... ». Et le milliard et demi d’euros qui a déjà été dépensé, pour la vaccination contre la grippe A, c’est justement la somme qu’il manque pour remettre à niveau les hôpitaux, selon lui.
Par ailleurs, les risques de pandémie placent les capitalistes devant la perspective qu’une partie significative des salariés se trouve en arrêt maladie pour avoir contracté la grippe A. C’est donc un enjeu économique. Dans son intervention, le militant CGT de l’inspection du travail a expliqué que la circulaire publiée le 3 juillet est « un catalogue qui rappelle aux employeurs l’étendue des mauvais coups qu’ils peuvent porter aux travailleurs », tout en respectant le code du travail. Cette circulaire conseille au patronat d’élaborer des « plans de continuité d’activité », en cas de pandémie, et de prévoir pour cela des mesures d’exception. Comment ? Par le recours à la « polyvalence des salariés et la modification de leur contrat de travail », ou encore par l’allongement de la journée de travail et la diminution du temps de repos des salariés. La circulaire conseille également le « prêt de main d’œuvre entre entreprises ». La loi autorise déjà toutes ces mesures. Si le patronat ne les met pas en application de façon systématique, c’est parce que dans des circonstances « normales », elles révolteraient la classe ouvrière.
Cerise sur le gâteau, le ministère du travail écarte d’avance l’exercice du « droit de retrait » des salariés en cas de pandémie, dès lors que le patron aura correctement « analysé les risques et pris les mesures de prévention recommandées ». La voie est libre pour faire porter aux travailleurs le poids des baisses de production qui résulteraient de l’absentéisme pour maladie.
Au passage, une déléguée syndicale a fait remarquer que de toute façon, beaucoup de salariés malades ne s’arrêtent pas de travailler. Un arrêt de travail signifie trois journées de « carence » impayées, après quoi les indemnités de la sécurité sociale sont inférieures au salaire. Beaucoup de salariés préfèrent aller travailler plutôt que se soigner, faute de revenus suffisants.
Les militants CGT présents à cette réunion étaient unanimement d’accord pour faire barrage à toute dégradation des conditions de travail, y compris dans un contexte de pandémie grippale. Les délégués syndicaux ne céderont pas au chantage. Ils convoqueront des assemblées générales pour démonter les opérations de propagande et porter ce mot d’ordre.