Je suis Auxiliaire de Vie Scolaire (AVS). J’ai signé un CDD en CUI (Contrat Unique d’Insertion, les fameux « contrats aidés ») et intégré un poste d’AVS en février dernier au terme d’une période de chômage de trois ans. J’étais en fin de droit, éligible à l’ASS quand une copine m’a parlé de ce recrutement organisé par Pôle Emploi et l’Education Nationale.
Le métier d’AVS n’est pas vraiment considéré. Pour être AVS, il n’existe pas de cursus de formation. Nous accomplissons les mêmes tâches que les AESH (Accompagnants des Elèves en Situation de Handicap) qui dépendent d’un contrat public passé avec l’Education Nationale, à la différence du contrat d’AVS de droit privé. Pour être embauché comme AESH, on doit être titulaire d’un diplôme professionnel dans le domaine de l’aide à la personne ou avoir exercé pendant au moins deux ans des fonctions d’aide à l’inclusion scolaire des élèves en situation de handicap.
Que l’on soit AVS ou AESH, la durée hebdomadaire de travail est de 20 heures pour un salaire net de 687 euros. C’est ce que l’on appelle du travail à temps partiel imposé, exercé à 90 % par des femmes en situation précaire.
Bien sûr, on nous informe que l’on peut cumuler un autre emploi : il faut en faire la demande au rectorat et ne pas travailler pendant les horaires et jours de classe, car notre planning peut changer à tout moment. Nous devons nous tenir à disposition ! Et au bout de six ans, on peut obtenir un CDI, toujours à 20 heures de travail hebdo : une panacée !
Notre mission est l’accompagnement dans l’école des élèves en situation de handicap. Les besoins en accompagnement des enfants handicapés sont identifiés par la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH), auprès de laquelle les familles adressent leur demande, après que la pathologie de l’enfant a été décelée et diagnostiquée.
Ecole inadaptée pour les enfants handicapés et leurs AVS
Pour les parents, il s’agit d’un véritable parcours du combattant qui peut prendre plusieurs mois avant que leur enfant soit accompagné. Beaucoup d’élèves perdent pied à ce moment-là. On se trouve dans une situation absurde où les élèves attendent d’être accompagnés et les AVS d’être affectés.
Les AVS représentent une compensation humaine au handicap d’un enfant au sein de l’école, qui se veut « inclusive » depuis la loi de 2014. Nous avons un rôle d’accompagnement en scolarité ordinaire, quelle que soit l’origine du handicap et quel que soit le niveau d’enseignement.
L’AVS est un assistant d’éducation pour l’intégration individualisée des élèves handicapés. Or, nous sommes catapultés en poste sans formation préalable aux différentes sortes de handicaps rencontrés. Nos tâches ne sont pas du tout les mêmes selon que l’on accompagne un enfant autiste, en fauteuil roulant, déficient visuel ou encore dyslexique.
Si les directeurs d’école sont en général assez bien informés, il arrive souvent que les enseignants ne le soient pas. Ils se trouvent alors confrontés à des difficultés liées à la nécessité d’adapter le matériel pédagogique et le mobilier de la classe afin d’accueillir l’élève et la personne accompagnante au sein de classes souvent surchargées.
Dans certains cas, la concertation entre l’enseignant et l’AVS, pourtant indispensable, s’avère difficile. Par manque de formation, les accompagnants peinent à trouver leur juste place et, par manque d’information, les enseignants éprouvent des difficultés à accepter cette présence dans leur classe. Autrement dit, aucun des acteurs de la situation n’y trouve son compte : ni les élèves (handicapés ou pas), ni les enseignants, ni les parents, ni les AVS.
Quel avenir pour les AVS ?
Pour le moment, les AVS en poste ne sont pas menacés par la suppression des contrats aidés décidée par le gouvernement Macron. En revanche, les recrutements ont beaucoup diminué, comparés au nombre grandissant de demandes à la MDPH. Et dans la période actuelle, rien ne garantit le renouvellement des contrats au bout d’un an.
Mr Blanquer, le ministre de l’Education Nationale, a déclaré vouloir rénover, dès le mois d’octobre 2017, l’accompagnement des enfants et des jeunes en situation de handicap, dans le but d’améliorer la continuité de leurs parcours et les conditions de vie de leurs familles. « Rénover » pour « améliorer » ? Que se cache-t-il encore derrière les intentions du gouvernement, annoncées avec sa langue de bois habituelle ? Qu’est-ce que cela changera pour les 50 000 AVS et les 28 000 AESH en poste actuellement ?
Cette insécurité, ajoutée aux conditions de travail souvent difficiles, génère de l’angoisse chez ces salariés dont la vocation est aussi de soulager celle des élèves fragilisés par leur handicap. « On se demande ce qui va pouvoir nous tomber sur la tête d’ici six mois ! », s’est écriée une de mes collègues. Alors qu’elle ne s’intéressait pas à la politique au moment des présidentielles, elle commence à faire le lien entre les décisions politiques et sa vie quotidienne.