Le 30 mai, la compagnie cubaine des télécommunications (ETECSA) a annoncé une augmentation soudaine de ses tarifs en même temps qu’une réduction à 6 Go du volume de données mobiles compris dans un abonnement mensuel. Tous les 3 Go supplémentaires, il faudra maintenant débourser 3360 pesos, soit plus de la moitié du salaire moyen. Ce changement brusque est contraire aux règles de l’ETECSA, selon lesquelles toute modification des contrats doit être annoncée 30 jours à l’avance.

Cette annonce a provoqué une vague de colère parmi la population cubaine, dont l’immense majorité utilise très régulièrement Internet. Les étudiants ont été en pointe de cette mobilisation. Des rassemblements et des meetings se sont succédé sur les campus. Les Fédérations d’étudiants de plusieurs universités – dont celle de La Havane – ont même publié un communiqué protestant contre cette décision de l’ETECSA. De la part d’organisations officielles de masse, une telle critique d’une entreprise d’Etat est sans précédent. Cela montre, d’une part, la perte d’autorité du gouvernement, mais aussi l’ampleur de la mobilisation.

Tentatives impérialistes

Bien sûr, une telle mobilisation ne pouvait se développer à Cuba sans que l’impérialisme américain ne tente d’en profiter pour attaquer la révolution cubaine. Les réseaux de la gusanera – les exilés contre-révolutionnaires organisés et financés par l’appareil d’Etat américain – ont tenté d’intervenir de l’extérieur dans le mouvement. Ils ont notamment fait circuler de fausses déclarations soi-disant adoptées par des assemblées d’étudiants, pour présenter le mouvement comme le prélude d’un soulèvement contre le gouvernement et la révolution cubaine.

Ces manœuvres ont ensuite été utilisées par la bureaucratie pour dépeindre la mobilisation comme le résultat d’un complot impérialiste, et non pas comme une réaction spontanée contre la décision scandaleuse d’une entreprise d’Etat.

Les tentatives d’ingérences de l’impérialisme ont été dénoncées par les étudiants mobilisés, qui ont aussi condamné ceux qui tentaient d’assimiler leurs revendications à la contre-révolution. Tout cela a néanmoins poussé le mouvement à se montrer plus prudent.

Crise économique

Cette mobilisation est le reflet de l’aggravation des conditions de vie sur l’île. Cuba subit depuis des décennies un blocus économique brutal imposé par Washington. Mais elle a été aussi frappée ces dernières années par l’impact de la pandémie sur le tourisme, par de nouvelles sanctions imposées par Trump durant son premier mandat (et confirmées ensuite par Biden), par la hausse des prix de l’énergie et par la baisse des exportations de pétrole vénézuélien. Tout cela a contribué à une sévère inflation et à des pénuries de plus en plus importantes, ainsi qu’à la baisse de la qualité des services publics.

Beaucoup de Cubains sont bien conscients des difficultés que rencontrent les entreprises d’Etat comme l’ETECSA, qui est forcée d’acheter des services et du matériel sur le marché mondial à des prix exorbitants. Mais ce qu’ils ne comprennent pas, c’est pourquoi ces difficultés devraient être supportées par la classe ouvrière, qui a déjà été frappée par les mesures austéritaires de « réorganisation de l’économie » en 2020, plutôt que par les bureaucrates qui continuent de bénéficier de bureaux climatisés et de voitures luxueuses.

Face aux problèmes causés par le blocus impérialiste et l’isolement de la révolution, les dirigeants cubains ont mis en œuvre un nombre croissant de concessions au marché capitaliste qui ont aggravé les inégalités sociales et économiques : création d’entreprises privées, licenciements, suppression des allocations publiques généralisées, etc.

Démocratie ouvrière

L’Etat cubain actuel a été créé par la révolution et défend donc formellement le mode de propriété qui en est issu : l’expropriation des capitalistes, des propriétaires terriens et des impérialistes. Mais l’Etat n’est pas sous le contrôle de la classe ouvrière, il est entre les mains d’une bureaucratie qui défend ses propres privilèges et échappe au contrôle des masses. Et cette bureaucratie s’est engagée depuis plusieurs années sur la voie des réformes capitalistes, qu’elle considère comme la seule façon de préserver son pouvoir. A terme, ce processus met en péril l’ensemble des conquêtes de la révolution de 1959.

La révolution cubaine est donc menacée d’une part par les attaques constantes de l’impérialisme, qui – en dernière analyse – ne peuvent être vaincues qu’en rompant l’isolement de la révolution cubaine et en étendant la révolution à l’échelle mondiale ; mais elle est aussi menacée par le processus de restauration du capitalisme entamé par la bureaucratie, qui doit être combattu par l’instauration du contrôle ouvrier et la participation directe des masses à l’administration de l’économie et du pays.

L’économie cubaine est dans une telle situation que des mesures difficiles devront être prises dans tous les cas. Mais ce n’est pas la même chose si ces mesures sont imposées d’en haut par la bureaucratie, pour défendre ses privilèges sur le dos des travailleurs, ou si elles sont adoptées consciemment par les masses révolutionnaires, après une discussion démocratique, dans le but de défendre la révolution.

Seule l’instauration d’une véritable démocratie ouvrière permettra de défendre la révolution cubaine et de repousser la double menace de l’impérialisme et de la restauration du capitalisme.

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