Début septembre, le gouvernement a annoncé l’envoi ponctuel de médecins généralistes, sur la base du volontariat, dans 151 zones en pénurie de médecins. Mais cette mesure n’est qu’un grain de sable jeté dans un désert médical : déjà 87 % des Français vivent dans une zone dite « sous-dense », et en 2021, on ne comptait que 3,3 médecins pour 1 000 habitants. Les conséquences sont graves – parfois mortelles – pour les personnes qui ne sont pas soignées à temps. Cette situation plonge ses racines dans la crise du capitalisme et des décennies de politiques d’austérité.

Numerus clausus

En mars 2025, le président de l’Ordre des médecins déclarait : « Il faut se poser la question de savoir si nous ne sommes pas en train de former trop de médecins ». Une déclaration qui révèle que cette institution défend les intérêts corporatistes des pontes de la médecine et l’agenda austéritaire de la bourgeoisie : les médecins de l’Ordre, aux côtés d’autres mandarins de la profession, ont d’ailleurs défendu la mise en place du numerus clausus.

Dans les années 1960, le nombre d’étudiants en médecine explosa : de 35 000 en 1963, il bondit à près de 60 000 en 1967. Une partie de cette jeunesse, portée par l’élan révolutionnaire de Mai 68, remettait en cause l’Ordre des médecins et scandait dans les amphithéâtres : « En médecine comme partout, plus de grands patrons ! ». Les mandarins, inquiets à la fois de cet esprit contestataire et de la concurrence future que ces nouveaux diplômés feraient peser sur leur patientèle, s’organisèrent autour du Syndicat Autonome des Enseignants de Médecine (SAEM) pour imposer une sélection dès la deuxième année.

Selon le syndicat, il s’agissait de préserver le prestige de la profession et d’éviter, selon ses mots, qu’une « armée de médecins aux pieds nus » ne favorise « l’étatisation de la médecine », autrement dit que la santé devienne véritablement publique. Cette orientation tombait à point pour la bourgeoisie qui, en pleine crise des années 1970, cherchait à réduire les dépenses de santé. Le numerus clausus fut instauré en 1971 et appliqué progressivement : les admissions, encore à 8 000 en 1972, tombèrent à 3 000 dans les années 1990.

La pénurie entraîna rapidement le recours à des médecins étrangers : les PADHUE (praticiens à diplôme hors Union européenne), moins bien payés et relégués à un statut de second rang par l’État. Dans le même temps, la charge de travail des internes explosait. Une enquête de l’Intersyndicale nationale des internes (ISNI) a montré qu’en 2020, ils exerçaient en moyenne 59 heures par semaine, alors que la limite légale est de 48 heures. 10 % d’entre eux travaillent plus de 79h ! Les conséquences sont dramatiques : en avril dernier, une interne de 23 ans se suicida après des semaines à plus de 100 heures de travail, parfois dix jours consécutifs. Selon les syndicats, un étudiant en médecine se suicide tous les 18 jours. Les infirmières et les aides-soignantes sont elles aussi surexploitées, souvent contraintes de réaliser des tâches qui dépassent largement leurs prérogatives pour pallier le manque de médecins.

Réformes en trompe-l’œil

Le gouvernement Macron a remplacé, en 2020, le numerus clausus par un numerus apertus. Cette réforme permettait à l’État de se décharger de sa responsabilité en laissant les universités décider du nombre d’étudiants acceptés en deuxième année. L’objectif était fixé à 8000 nouvelles places d’ici 2027. Mais sans professeurs, sans locaux, ni moyens supplémentaires, les doyens des écoles de médecine eux-mêmes reconnaissaient l’impossibilité d’atteindre cet objectif.

En juin 2025, le ministre de la Santé, Yannick Neuder (LR), a mis fin au numerus apertus, cette fois en faisant porter la responsabilité du nombre de places sur les Agences Régionales de Santé (ARS). Mais sans moyens supplémentaires, là encore, rien ne change.

En mars, l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi du groupe socialiste qui subordonne l’installation de médecins en zones sur-dotées au départ en retraite d’un confrère. Une telle mesure pousserait de jeunes praticiens vers des territoires sous-dotés et souvent privés d’infrastructures médicales essentielles, les laissant isolés face à des patients nécessitant des soins spécialisés. La régulation imposée dans un contexte d’austérité ne peut résoudre le problème.

Les collectivités territoriales rivalisent alors d’initiatives pour attirer les médecins : subventions, logements gratuits, matériel offert, voire bateaux et repas étoilés. Evidemment, ces dépenses restent dérisoires face aux milliards nécessaires pour un véritable plan national d’accès aux soins.

Pour un véritable service public de la santé

À gauche, la France insoumise défend la création d’un « véritable service public de soins primaires, organisé autour de centres de santé, avec des professionnels salariés, et une prise en charge à 100 % par la Sécurité sociale ». Nous sommes d’accord avec cette mesure, mais il faut aller plus loin. Pour répondre réellement aux besoins, il faut libérer tout le système de santé des griffes du marché.

Il faut nationaliser les hôpitaux, cliniques, laboratoires pharmaceutiques et mutuelles privées, sous le contrôle démocratique de leurs salariés. Il faut aussi nationaliser les banques, afin de mobiliser les moyens financiers nécessaires pour un investissement massif dans la santé publique : embauches de personnels, nouveaux équipements et modernisation des structures.

Un tel plan permettrait d’implanter sur tout le territoire des centres de soins complets, regroupant les spécialités essentielles, où les médecins seraient salariés avec des conditions de travail dignes et des salaires décents – et qui assureraient à tous un accès entièrement gratuit à la santé.

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