Cet article a été rédigé le 20 avril.
L e 6 avril dernier, des centaines de milliers de Soudanais se sont rassemblés devant le quartier général de l’armée, à Khartoum (la capitale), pour demander à l’armée de rejoindre le peuple dans sa lutte contre la dictature d’Omar el-Béchir, au pouvoir depuis 1989. Cela faisait suite à plusieurs mois de grandes mobilisations contre les politiques d’austérité du régime.
La goutte qui a fait déborder le vase est la décision du dictateur de multiplier le prix du pain par trois (de 1 à 3 livres soudanaises), dans un pays où près de 50 % de la population vit avec moins de 1,90 dollar par jour.
Craignant que la révolte ne touche la base de l’armée, l’état-major a renversé Béchir, le 11 avril. Cette manœuvre des généraux ne visait pas à répondre aux demandes du peuple soudanais, qui réclame la démocratie et un gouvernement civil, mais simplement à se débarrasser de Béchir, devenu le maillon faible du régime, pour ramener l’ordre.
Transition fictive
C’est alors un « Conseil militaire » de transition qui a pris « pour deux ans » la tête de l’Etat sous la direction d’Awad Ibn Aouf, l’ancien ministre de la Défense de Béchir. Mais après quatre mois de mobilisation, le peuple a compris que ce nouveau gouvernement n’était qu’une mascarade et que rien ne changerait sous l’égide d’un ex-ministre de Béchir. Le 12 avril, des millions de Soudanais manifestaient contre ce nouveau gouvernement. Vingt-quatre heures après sa prise de fonction, Awad Ibn Aouf était contraint de démissionner à son tour.
C’est Abdel Fattah al-Burhan, inspecteur général de l’armée, qui fut alors nommé à la tête du pays. La classe dirigeante soudanaise espérait que, contrairement à son prédécesseur, al-Burhan ne serait pas considéré comme faisant partie de l’establishment, et que sa nomination donnerait l’illusion d’un changement. Il n’en est rien : le peuple refuse ce nouvel avatar du régime et revient en masse dans les rues.
Des comités d’organisation des manifestations et des comités de grève ont fait leur apparition, ces dernières semaines. Ils peuvent être l’embryon d’un pouvoir populaire alternatif au régime capitaliste soudanais. Ces comités doivent se généraliser et s’organiser aux niveaux local, régional et national. A bas le conseil militaire de transition ! Tout le pouvoir aux comités du peuple en lutte !