L’accord sur le nucléaire iranien, signé mi-juillet, a été salué par des manifestations de joie à Téhéran et d’autres villes du pays. Il met fin à près de trois décennies de sanctions économiques contre l’Iran imposées par l’impérialisme américain. Il marque l’échec complet de la stratégie de Washington. Depuis le renversement du régime fantoche du Shah, en 1979, les Etats-Unis ont attaqué sans discontinuer l’Iran au moyen de sanctions économiques, mais aussi en soutenant la guerre d’agression menée par l’Irak de Saddam Hussein en 1980.
Le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et l’Arabie Saoudite n’ont cessé de menacer l’Iran depuis des années, qualifiant le régime de « menace pour la stabilité de la région ». Cette position est complètement hypocrite, car Israël a déjà agressé au moins une fois chacun de ses voisins ; c’est par ailleurs la seule puissance nucléaire de la région. L’Arabie Saoudite, de son côté, soutient depuis des décennies les pires forces de la réaction au Moyen-Orient, finançant des groupes jihadistes et réprimant tous les mouvements populaires. Le gouvernement saoudien avait même annoncé son intention de se doter de l’arme nucléaire – via le Pakistan – si un accord devait être signé avec l’Iran.
Un nouvel allié
Contrairement à ce que certains prétendent, cet accord n’est pas le fruit de la « volonté de paix » d’Obama ou de Rouhani. Il n’est pas davantage le résultat du travail de « bons négociateurs » qui auraient « débloqué » la situation. En dernière analyse, la diplomatie bourgeoise dépend de l’équilibre des forces, qui est déterminé par la puissance économique et militaire des nations – et non par l’intelligence de ses diplomates. Cet accord marque en fait la reconnaissance, par les Etats-Unis, du fait qu’ils n’ont pas pu soumettre l’Iran à leur volonté – et qu’à l’inverse ils ont désormais besoin de s’appuyer sur le régime des Mullahs pour stabiliser la situation dans la région.
L’Iran est aujourd’hui la source d’influence dominante en Irak et en Syrie. Il exerce aussi une influence déterminante au Liban (via le Hezbollah) et au Yémen, où ses alliés Houthistes ont été parmi les plus efficaces ennemis d’Al-Qaïda dans cette péninsule arabe. Pour les Etats-Unis, l’Iran, ancien membre de « l’axe du mal », est donc devenu la seule puissance fiable pour mener le combat sur le terrain contre l’Etat Islamique. A l’inverse, les plus proches alliés des Américains (Israël, Turquie et Arabie Saoudite) sont devenus des sources d’ennuis, car tous soutiennent les jihadistes à des degrés divers.
Reprise économique
En Iran même, la levée des sanctions va déboucher sur une forte reprise de l’économie et des investissements étrangers. Cela va renforcer la position militaire et politique de l’Iran dans la région et inciter la Turquie, Israël et les Etats du Golfe à répondre à cette montée en puissance. Dans cette course aux armements, les Etats-Unis vont se retrouver coincés entre l’Iran et leurs alliés traditionnels.
L’aggravation des sanctions, au cours de la dernière période, avait entraîné une profonde récession de l’économie iranienne, provoquant une hausse massive du chômage et de l’inflation. Dans le même temps, Barack Obama et Benjamin Netanyahu menaçaient constamment d’entrer en guerre contre l’Iran, ce qui aggravait encore le sentiment d’insécurité des masses iraniennes. Les sanctions et la menace de guerre avaient contribué à unir les masses derrière le régime, face à l’impérialisme de Washington. A présent que l’accord est signé, le régime ne peut plus invoquer la menace étrangère pour s’assurer le soutien de la population.
Les divisions de classe referont surface dès qu’il sera clair que l’accord ne profite pas aux masses, mais seulement aux capitalistes iraniens et occidentaux qui exploitent les travailleurs d’Iran. La reprise du commerce et de l’industrie poussera les travailleurs iraniens à demander des augmentations de salaires et de meilleures conditions de vie et de travail. Ce faisant, ils entreront en conflit avec l’appareil d’Etat, ce qui transformera les luttes économiques en une lutte politique contre la dictature elle-même. Un renouveau de la lutte des classes et du mouvement révolutionnaire en Iran sera une immense source d’inspiration pour les travailleurs et la jeunesse de tout le Moyen-Orient.