Le 9 juillet 2013, l’Assemblée Nationale a définitivement adopté la loi « relative à l’enseignement supérieur et à la recherche », dite loi Fioraso, du nom de la ministre ayant porté ce projet.
Sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, les étudiants et les enseignants des universités s’étaient massivement mobilisés contre la loi « Libertés et Responsabilités des Universités » (LRU) défendue par la ministre de l’époque, Valérie Pécresse. La LRU et ses ajouts ont depuis lors prouvé leur nuisance en étranglant financièrement les universités, en les soumettant davantage aux intérêts des capitalistes et en réduisant les droits démocratiques en leur sein.
Avec l’élection de François Hollande et l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement dirigé par le Parti Socialiste, les membres de la communauté universitaire étaient en droit d’attendre un changement de cap dans la politique à l’égard de l’enseignement supérieur et de la recherche. Qu’en est-il réellement ?
Pas de moyens financiers
Alors que la loi Fioraso donne de nouvelles responsabilités aux universités, aucune véritable augmentation des moyens financiers n’est prévue. Elle annonce simplement un débat au parlement, tous les deux ans, autour des moyens et des résultats des universités. L’enseignement supérieur devrait donc rester le parent pauvre des politiques publiques, en dépit d’un manque de moyens criant qui a poussé plusieurs universités à présenter un budget en déficit au cours de ces dernières années. Les conditions de travail, de vie et d’étude à l’université vont donc continuer de se dégrader au cours des prochaines années, le seul engagement concret du gouvernement étant la titularisation de 5000 agents contractuels. Or c’est largement insuffisant au regard des quelque 50 000 précaires de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Soumission aux intérêts privés
La loi LRU du gouvernement Sarkozy visait à soumettre toujours plus les universités aux intérêts du patronat, soit directement en permettant à des « représentants du monde économique » (comprendre : des patrons) de siéger aux conseils d’administration (CA) des universités, soit indirectement en adaptant les formations aux besoins de main-d’œuvre immédiats des entreprises, sacrifiant ainsi l’avenir des étudiants aux intérêts à court terme de celles-ci.
La loi Fioraso ne revient pas sur ces dispositions ; bien au contraire, elle les renforce. Non seulement les patrons pourront continuer de siéger dans les CA des universités, mais ils pourront également voter pour désigner le président de l’université, prérogative jusqu’ici réservée aux représentants élus des étudiants et des personnels de l’université. Pire : la loi augmente le nombre de représentants patronaux au sein des « communautés d’universités ». Or, elle prévoit que ces « communautés » seront les seules à passer contrat avec l’Etat pour obtenir des moyens, avant de les répartir entre les différentes universités membres. Les capitalistes pourront donc choisir de financer les études et les recherches qui correspondent le plus à leurs intérêts.
Une nouvelle mission de l’enseignement supérieur et de la recherche a d’ailleurs été inscrite dans le code de l’éducation : le « transfert des résultats vers le monde économique ». En substance, il faudra que le travail des universités soit une source de profit pour les capitalistes.
La valeur des diplômes
Si cette loi contient quelques points qui peuvent être jugés positifs, comme la réduction du nombre d’intitulés de licences (plusieurs centaines actuellement) et de masters (plusieurs milliers), dont la profusion nuit à la lisibilité de l’offre de formation pour les étudiants, elle contient aussi de graves reculs en la matière. Ainsi, la qualité des formations ne sera plus vérifiée a priori au niveau national. La nouvelle procédure consistera à accréditer les établissements en leur reconnaissant la capacité de monter les formations qu’ils proposent dans un « cadre national de formation ». La vérification effective du contenu des diplômes se fera donc a posteriori, ouvrant la possibilité que des étudiants se retrouvent inscrits dans un diplôme finalement invalidé.
En résumé, il y a donc une véritable continuité entre les réformes Pécresse et Fioraso. Dans le domaine universitaire comme dans les autres, le « changement » promis par le candidat Hollande se fait attendre.