Dans le monde entier, on parle du faible taux du chômage aux États-Unis. Actuellement, le chômage est officiellement à 4,3%. Mais ce chiffre mérite d’être examiné de plus près. Une part importante des emplois créés ne sont pas des emplois stables, mais plutôt ce que nous appelons des "MJobs", c’est-à-dire des postes "flexibles", de courte durée et le plus souvent sans couverture sociale. Rien d’étonnant dès lors à ce que l’entreprise enregistrant la plus forte progression aux États-Unis soit Manpower, qui "loue" des salariés par intérim à d’autres entreprises. Ce sont surtout les femmes et les jeunes qui sont ciblés par de telles agences.
L’époque où l’on comptait sur un emploi sûr et durable pour faire vivre sa famille est révolue. Actuellement, plusieurs personnes d’un même foyer doivent travailler afin de "joindre les deux bouts" du budget familial. De plus, beaucoup d’Américains ont deux ou même trois "petits boulots", laissant peu de temps pour la famille, l’éducation, les loisirs et l’épanouissement de l’individu en général, sans parler de la possibilité de s’intéresser à la vie politique du pays.
Beaucoup de citoyens américains rentrent du travail n°1, prennent une douche, font une sieste de 30minutes, et repartent au travail n°2. Ensuite ils prennent un repas fade du genre "prêt-à-manger" avant de dormir et recommencer le même cycle infernal le lendemain. Les chiffres du chômage dissimulent cette réalité. La plupart des emplois créés par le capitalisme américain ne sont acceptés que faute de mieux.
Un autre aspect de la situation aux États-Unis que je voudrais porter à l’attention des lecteurs de La Riposte concerne le nombre très élevé de personnes qui se trouvent en prison. En matière d’incarcération de ses propres citoyens, les États-Unis battent tous les records parmi les états dits "démocratiques". Selon le Département de la Justice, la population carcérale des États-Unis a progressé de moins de 200 000 en 1971 au chiffre colossal de 1 820 000 au 31 décembre 1998 ! Dans la seule année de 1998, le nombre de prisonniers a augmenté de 4,6%, à savoir 80400 personnes ! Ceci signifie qu’un citoyen américain sur 149 se trouve derrière les barreaux, soit l’équivalent de la population toute entière de Houston dans le Texas, la quatrième concentration urbaine des États-Unis, ou encore deux fois la population de San Francisco !
Les États-Unis font du tapage sur le thème des "droits de l’homme" en Chine ou dans d’autres pays dans le monde, mais en Chine, par exemple, a une population cinq fois plus importante et 500 000 prisonniers de moins que les États-Unis.
A noter aussi qu’en 1997, l’année la plus récente dont les statistiques sont disponibles, la population carcérale dans ce pays étaient à 49% des noirs. Au milieu des années 90, environ un tiers des jeunes noirs étaient soit en prison, soit en liberté en attente d’une décision pénale, soit en liberté conditionnelle. Le nombre de prisonniers d’origine hispanique a quadruplé depuis 1980. Quant aux femmes, entre 1970 et 1996 la population carcérale féminine a été multipliée par treize, passant de 5 600 environ à plus de 75 000 ! Depuis 1980, les taux d’incarcération des femmes noires a été supérieur à celui des hommes blancs.
Les conditions dans les prisons se sont nettement aggravées. A plusieurs par cellule, souvent mélangeant criminels violents et condamnés inoffensifs, les incarcérés doivent aussi subir la tyrannie des gardiens. Les prisons sont surchargées, dépassant leur capacité de 13% à 22% selon les différents états. La population des prisons fédérales dépasse la capacité officielle de ces établissements de 27%. Les travaux forcés sont encore pratiqués dans ce "pays de liberté". Dans plus de 30 états, les administrations ont légalisé l’exploitation d’une main d’œuvre carcérale par des entreprises privées. Il s’agit souvent de travaux pénibles, très mal payés, sans droits syndicaux et sans rémunération des heures supplémentaires.
Dans certains états, des prisonniers enchaînés travaillent dans des carrières ou font des travaux d’entretien sur la voie publique. Aussi des prisonniers occupent-ils des postes "normaux", où leurs salaires dérisoires concurrencent ceux des autres salariés du secteur.
Des incarcérés fabriquent des plaques d’immatriculation, font du "télémarketing" prennent des réservations de vol et assure même l’expédition des logiciels Windows de Bill Gates. Dans l’Ohio, le groupe automobile Honda paie un salaire horaire de deux dollars aux salariés "prêtés" par une prison locale pour assurer un poste qui serait payé à vingt dollars s’il était occupé régulièrement par un membre du syndicat UAW (Union of Automobile Workers).
Cette exploitation est tellement lucrative pour les capitalistes qui en profitent, qu’il existe même un puissant lobby en faveur de la privatisation des prisons !