Lors d’un référendum qui s’est tenu le 25 octobre dernier, 78 % des électeurs chiliens se sont prononcés pour la convocation d’une Assemblée constituante. C’est une victoire écrasante pour la classe ouvrière, qui a voté massivement en faveur de ce changement : jusqu’à 90 % de votes « pour » dans les quartiers les plus populaires.
Les travailleurs chiliens ont clairement démontré leur détermination à se débarrasser de la Constitution réactionnaire de 1980, adoptée pendant la dictature de Pinochet. Ce texte, qui soutenait un capitalisme « néolibéral » (sauvage) et un pouvoir exécutif autoritaire, avait été conservé par la classe dirigeante malgré la « transition démocratique » des années 1990.
Le référendum du 25 octobre a eu lieu un an après la grande « Rébellion » d’octobre 2019, qui a vu les jeunes et les travailleurs descendre par millions dans les rues, une grève générale paralyser le pays et des éléments embryonnaires de pouvoir ouvrier se former : conseils de grève, assemblées de quartier, groupes d’autodéfense collective, etc. Cette vague révolutionnaire a jeté la classe dirigeante sur la défensive, l’obligeant à ouvrir la perspective d’une réforme de la Constitution. Elle espère ainsi canaliser la colère populaire dans le cadre policé de débats constitutionnels, eux-mêmes placés sous le contrôle d’un Parlement dominé par les partis de droite.
Crise économique
En dépit de cette manœuvre, les capitalistes chiliens craignent que le processus constituant ne ranime la mobilisation révolutionnaire des masses chiliennes. Le pays s’enfonce dans une profonde crise économique ; le taux de chômage officiel a atteint 12,9 % au troisième trimestre 2020. Dans ce contexte, la mobilisation autour d’une nouvelle Constitution pourrait voir émerger des revendications économiques radicales.
La victoire électorale des travailleurs chiliens peut être célébrée, mais elle ne suffira pas à libérer le pays de ses inégalités chroniques, de ses injustices sociales et de la violence de sa police. La composition de l’Assemblée constituante sera dominée par les partis réactionnaires. Seule une mobilisation indépendante de la classe ouvrière – qui a montré, fin 2019, ce dont elle était capable – permettra d’en finir avec tout l’héritage de l’ère Pinochet. Dans la rue comme dans les urnes, le mouvement doit se poursuivre autour d’un programme révolutionnaire : exproprier les multinationales et les capitalistes, balayer le régime qui sert leurs intérêts et placer l’économie sous le contrôle des travailleurs.