Le prétendu « transfert du pouvoir » en Irak n’a été qu’un nouvel exemple de l’hypocrisie de l’administration américaine. Le Premier Ministre, Iyad Allaoui, est depuis longtemps un agent stipendié de la CIA. Le Président, Ghazi Al Yaouar, est un protégé de la monarchie saoudienne. Quelques 200 agents de la CIA et du Pentagone sont en poste, dans les ministères, pour s’assurer que rien n’est fait qui soit contraire aux intérêts de l’impérialisme américain. Tout cela n’a évidemment rien à voir avec une quelconque « souveraineté nationale ». Les médias veulent nous faire croire qu’il s’agit d’un premier pas vers la démocratie. Et pourtant, le tout premier acte de cette officine collaborationniste a été de se doter de pouvoirs spéciaux particulièrement draconiens. Cependant, ces pouvoirs ne changent rien pour le peuple, qui vit sous la dictature du commandement de l’armée américaine depuis la chute de Bagdad, en 2003.
La stratégie des autorités militaires américaines est claire : lors des bombardements à répétition de Falloujah, lors de l’attaque contre Nadjaf, ou encore lorsque les villages soupçonnés d’abriter des insurgés sont incendiés, elles prétendent qu’elles ne font qu’exécuter les instructions du « gouvernement » irakien. Comme si chacun des « ministres » ne devait sa place à l’approbation de Bremer et de son successeur Negroponte !
La population irakienne brûle d’indignation devant la spoliation de son pays au profit des groupes américains proches de l’administration Bush, tel Halliburton. Plusieurs villes, comme Falloujah, Kerbala et Nadjaf sont effectivement « hors limites » pour les forces d’occupation. La stratégie américaine, qui consiste à lancer ses hélicoptères et ses chasseurs-bombardiers parmi les hommes, femmes et enfants des banlieues jugées « rebelles », ne fait que renforcer la haine contre l’envahisseur. La résistance armée se généralise, et devient une véritable guerre de libération nationale. L’impérialisme américain s’enlise inextricablement dans un bourbier, dont la seule issue possible - au prix de pertes énormes en vies humaines et en dollars - est la défaite. Il y a une raison simple à cela : les forces d’occupation ne disposent d’aucune base sociale dans le pays.
Pour les militants du PCF et du MJC, comme pour tout militant de gauche sérieux, notre devoir internationaliste élémentaire est bien évidemment de s’opposer fermement à l’occupation de l’Irak et de soutenir la lutte contre l’impérialisme. Par conséquent, notre devoir est de démasquer ce simulacre de « démocratie » et de « souveraineté » mis en place par l’impérialisme américain pour dissimuler la réalité de la dictature et l’oppression dont il est responsable. Il devrait en être de même pour tous les membres et sympathisants du Parti Communiste Irakien (PCI), qu’ils se trouvent en Irak où ici, en France. On comprend bien, dès lors, la consternation de bon nombre de communistes, en France et en Irak, vis-à-vis de la participation du PCI au gouvernement pro-impérialiste d’Allaoui.
Les dirigeants du PCI justifient leur politique collaborationniste en disant qu’elle permet de « hâter le départ des Américains ». Cela revient à peu près à justifier une participation au gouvernement de Vichy, pendant l’occupation de la France, pour « hâter le départ » des Allemands ! Posons la question concrètement : dans quelles conditions l’impérialisme américain pourrait-il accepter de se retirer d’Irak ? Il est clair que cela ne serait possible que lorsqu’il aurait la certitude que les forces armées et le gouvernement irakiens qu’il laisserait sur place pourraient défendre ses intérêts aussi sûrement que ses propres forces armées. Cela signifie, pour Allaoui et consorts, « créer les conditions » du départ des Américains, autrement dit se montrer tout aussi oppressifs et dévoués à l’impérialisme que ses représentants directs.
Une tentative de justifier la collaboration consiste à montrer du doigt le caractère « anti-démocratique » et « intégriste » de certains dirigeants engagés dans la lutte armée, comme par exemple Muqtada Al Sadr. Or, si le devoir d’un communiste est de soutenir et de participer à la lutte de libération nationale, cela ne signifie nullement qu’il doive soutenir la politique des chefs comme Al Sadr. Il faut, au contraire, se placer hardiment du côté de la jeunesse irakienne qui s’engage dans la lutte contre l’occupation, tout en présentant un programme alternatif à l’idéologie réactionnaire des mollahs. Mais, précisément, les dirigeants du PCI pensent-ils pouvoir convaincre la jeunesse du haut du strapontin qu’ils occupent dans le « gouvernement » mis en place par les forces d’occupation ?
Le PCI compte dans ses rangs un nombre important de militants qui ont beaucoup souffert sous Saddam Hussein, à l’époque où celui-ci était armé et appuyé par la Maison Blanche. La CIA fournissait au dictateur des renseignements sur les militants du PCI, dont beaucoup ont été tués ou torturés. La place du PCI n’est pas au gouvernement installé par l’impérialisme. Sa place est dans la résistance, dont la direction ne doit pas être abandonnée au clergé islamique ou aux anciens baasistes.
Ici, en France, aucun militant sérieux du PCF et du MJC ne peut se permettre de rester silencieux sur le caractère ultra-réactionnaire du gouvernement Allaoui. Malheureusement, il faut dire que, jusqu’à présent, les textes émanant des instances dirigeantes du parti et du MJC sur cette question sont loin d’être satisfaisants. Certes, les condamnations de Bush et les appels à la fin de l’occupation ne manquent pas. Cependant, l’attitude envers le gouvernement Allaoui y est pour le moins ambiguë. De même, la participation du PCI dans le gouvernement n’est pas condamnée. Rappelons que le texte d’orientation présenté au dernier congrès du MJC, et qui reprenait à son compte les formulations des textes du parti, accueillait favorablement le Conseil Gouvernemental Intérimaire.
Il est grand temps de tirer les choses au clair. La lutte contre l’impérialisme en Irak, c’est aussi notre affaire. Nous demandons aux sections locales du PCF et du MJC de mettre cette question à l’ordre du jour et de présenter leurs idées, sous forme de résolutions, auprès des instances dirigeantes appropriées.