"Les patrons reprennent confiance et augmentent leurs investissements" lit-on dans une dépêche de l’AFP largement répercutée dans la presse. De manière générale, à en croire les commentateurs économiques des médias, nous serions face à une véritable reprise des investissements en France.
Le taux d’investissement, et en particulier de l’investissement industriel, constitue en effet la force motrice de l’économie. Mais le niveau des investissements productifs en France traduit avant tout un manque de confiance, de la part des grands investisseurs, en la viabilité du capitalisme, car malgré une certaine augmentation de ces investissements productifs depuis deux ans, leur niveau demeure extrêmement faible, à la différence des investissements spéculatifs par lesquels les capitalistes s’enrichissent sans rien produire.
Si l’on examine les chiffres fournis par l’INSEE sur les dépenses d’équipement des entreprises françaises, on s’aperçoit que les opérations spéculatives attirent beaucoup plus les grands détenteurs de fonds que l’investissement dans l’économie réelle.
Pendant la reprise économique de la fin des années 80, les dépenses d’équipement des entreprises augmentaient régulièrement d’année en année, passant de +4% en 1986, à +6% en 1987, +9% en 1988, et +11% et +15% en 1989 et 1990.
A partir de 1991, l’investissement se ralentit de façon dramatique, n’enregistrant qu’une hausse de 1% en 1991, et chutant de -9% et -18% en 1992 et 1993, une année où le PIB de la France a baissé par rapport à l’année précédente.
Si l’on regarde les mêmes statistiques au cours de ces dernières années, l’évolution des investissements en équipement était proche de 0% en 1996 et 1997. Ils augmentent depuis à un rythme annuel de 6%. On est donc bien loin des performances enregistrées au cours de la dernière reprise, et les estimations de l’INSEE pour l’an 2000 prévoient un nouveau ralentissement. De quoi souligner la fragilité de la reprise actuelle que nous avons traité dans l’éditorial du n° 5 de La Riposte, une reprise qui de toute façon ne survivra pas au ralentissement inévitable et à un krach possible de l’économie américaine.
Aussi faut-il constater que l’époque où la progression de l’investissement était synonyme de création d’emplois est définitivement révolue. Bien au contraire, dans toutes les branches de l’économie, les investissements consentis par les actionnaires visent avant tout à faire des économies en termes de masse salariale et d’effectifs. La phase de croissance actuelle peut se poursuivre jusqu’en 2001 ou tout au plus jusqu’en 2002. En attendant, ce sont les grands actionnaires des multinationales qui récolteront les fruits de la reprise actuelle.
Malgré des bénéfices records, le patronat des grandes entreprises exerce une pression sans relâche pour faire des économies sur le dos des salariés. C’est la même situation dans le secteur public. L’Education nationale n’a certainement pas profité de la reprise. Le secteur de la santé publique non plus. Le capitalisme est devenu tellement parasitaire que même par temps de croissance économique, nous assistons à une régression sociale dans pratiquement tous les secteurs de la société.