La récession attise une crise du logement qui lui est bien antérieure. Pour des millions de ménages – et pas seulement les plus modestes – le logement est en première ligne des phénomènes d’appauvrissement et de précarisation.
Emploi, salaire et logement sont indissociables. Alors que la crise économique aggrave la précarité et limite la progression des revenus, le déficit d’offres de logement accessible s’est encore accentué, ces dernières années. A la fin des années 80, le logement absorbait en moyenne 12,5 % du budget d’un ménage. Aujourd’hui, le chiffre est de 25 % – et, pour les familles les plus modestes, souvent 40 %, 50 % et plus. Un couple avec deux enfants, qui gagne 3000 euros par mois, dépense en moyenne le quart de son budget pour se loger s’il est en logement social – et la moitié s’il est dans un logement privé ! C’est insupportable.
A cela s’ajoute le cancer du mal-logement et de la précarité. En 2010, la France compte 3,5 millions de personnes SDF ou mal-logées, auxquelles s’ajoutent plus de 6,6 millions de personnes en situation de réelle fragilité, sur le logement, à court ou moyen terme (exiguïté, insalubrité, retard de loyers ou de remboursements, etc.). Sans oublier les quelque 200 000 personnes – parmi lesquelles des femmes et des enfants – qui n’ont plus que la rue pour vivre. Une rue où, depuis 1998, plus de 2000 personnes sont mortes de froid.
Face à la précarisation du travail et à la montée du chômage, le logement social est une aspiration légitime des familles qui ne peuvent plus se loger dans le privé, tant les loyers et les prix de l’immobilier ont flambé. Pour sortir de cette crise, la plus grave depuis le fameux appel de l’Abbé Pierre, en 1954, il faudrait que l’Etat investisse massivement : environ 4 % du PIB, chaque année. On en est actuellement à moins de 2 %. Lorsque Christine Boutin était ministre du logement, elle expliquait qu’il faudrait construire 500 000 logements sociaux par an, pour répondre aux besoins. Or, en 2008, le chiffre était de 380 000, et il a encore chuté en 2009. Pendant ce temps, 1,4 million de familles sont en attente d’un logement social.
La subvention de l’Etat pour la construction des logements sociaux (l’aide à la pierre) baisse d’année en année. Dans le budget de 2010, elle est tombée à 1000 euros par logement. Pendant ce temps, les aides personnelles explosent. La politique des gouvernements successifs a été de se désengager du logement social et de mettre le paquet en faveur du secteur privé.
Le coût, pour l’Etat, d’un « Prêt locatif à usage social » est de 36 482 euros par logement. En comparaison, le dispositif – dit « Scellier » – de défiscalisation de l’investissement dans le neuf coûte 75 000 euros à l’Etat. Ce dernier est délibérément privilégié. C’est inscrit dans la loi des finances de 2010. En privilégiant l’aide à l’accession à la propriété, l’Etat subventionne indirectement les capitalistes du secteur immobilier – et les banques qui sont derrière. Le logement social – moins profitable – est délaissé. On a moins construit de logements sociaux qu’on en a détruits (0,7 pour 1). En outre, il n’y aura pas un euro de subvention pour les réhabilitations, en 2010. Et pendant ce temps, on continue de construire des « logements Scellier » et autres qui restent vides.
Pour en finir avec le fléau du mal-logement, des mesures d’urgence s’imposent : 1) Gel des loyers ; 2) Réquisition de tous les logements laissés vacants à des fins spéculatives ; 3) Expropriation et réhabilitation de tous les hôtels et logements des « marchands de sommeil » ; 4) Arrêt immédiat des expulsions locatives ; 5) Nationalisation des entreprises du BTP et construction massive de logements sociaux.