Début avril, le réseau Renforcer le PCF, renouer avec le marxisme organisait une semaine de formation marxiste au Prolé d’Alès, dans le Gard. Depuis la fondation de ce réseau de militants communistes, en janvier 2010, les camarades d’Alès ont organisé des formations de ce type deux fois par an. Leur succès ne se dément pas. Cette fois-ci, il y avait à chacune des trois réunions entre 25 et 30 personnes.
La Révolution française
La première réunion avait pour thème la Révolution française de 1789-95. Jérôme Métellus (PCF Paris) en a rappelé les prémisses – crise de la dette publique (tiens, tiens…), division de la classe dirigeante, convocation des Etats généraux – puis les grandes étapes, de l’insurrection du 14 juillet 1789 à la chute de Robespierre, cinq ans plus tard.
Entre ces deux dates, il y a les flux et reflux des mobilisations massives du peuple, qui ont poussé la révolution beaucoup plus loin que la grande bourgeoisie française ne le souhaitait. En effet, celle-ci se serait bien contentée d’une monarchie constitutionnelle, c’est-à-dire d’un compromis avec l’aristocratie. L’intervention des couches inférieures du « Tiers état » a fait éclater ce compromis, mais elle ne pouvait pas, à l’époque, aboutir au remplacement de l’ordre féodal par une société sans classes. L’industrie et la classe ouvrière modernes, prémisses objectives d’une révolution socialiste, étaient encore embryonnaires. La Révolution française ne pouvait qu’ouvrir la voie à une expansion rapide des rapports de production capitaliste.
Lors du débat, plusieurs camarades ont évoqué le rôle des grands esprits français du XVIIIe siècle – Rousseau, Voltaire, Diderot, etc. – dans la préparation « théorique » de la Révolution française. A ce propos, Jérôme a souligné une différence importante entre une révolution bourgeoise (comme celle de 1789-95) et une révolution socialiste. Pour prendre le pouvoir, la bourgeoisie n’a pas eu besoin d’une conception scientifique de l’Histoire et de son propre rôle, comme classe sociale. Elle exprimait ses intérêts de classe dans le langage de la « Raison » et de « l’universalité des droits de l’homme », c’est-à-dire sous une forme idéalisée, qui n’exprimait pas les contradictions de classe internes au Tiers état. A l’inverse, la classe ouvrière ne peut prendre le pouvoir qu’avec, à sa tête, un parti révolutionnaire doté d’un programme et d’idées scientifiques. D’où l’importance cruciale de la théorie, dans notre combat.
La révolution vénézuélienne
Le lendemain, Hubert Prévaud, militant du PCF à Toulouse, a fait un exposé sur la révolution vénézuélienne, un mois après le décès de Chavez. Il a rappelé qu’une révolution, c’est d’abord et avant tout « l’intervention soudaine, sur la scène politique, de la masse de la population, jusqu’alors passive ». Depuis l’arrivée au pouvoir de Chavez en 1998, c’est toujours la mobilisation révolutionnaire du peuple vénézuélien qui a permis de repousser les offensives de la réaction : lors du coup d’Etat d’avril 2002, lors du lock-out patronal de décembre 2002 et janvier 2003, lors du référendum révocatoire de 2004 – et ainsi de suite.
L’héritage politique de Chavez est considérable, a expliqué Hubert. Bien sûr, il y a d’abord les avancées réalisées grâce aux « missions » sociales en matière de santé, d’éducation et de logement publics, qui ont transformé les conditions de vie de millions de Vénézuéliens, en particulier parmi les plus pauvres. Mais il y a deux autres aspects de l’héritage de Chavez qui sont peut-être encore plus importants. Premièrement, Hugo Chavez a énormément contribué à donner confiance aux masses en leurs propres forces. Sa façon de s’adresser à elles, de les exhorter à l’action, mais aussi de répondre à ses pressions par des mesures visant l’oligarchie, a créé une relation très puissante entre Chavez et les masses.
Deuxièmement, et c’est peut-être le plus important, Chavez a proclamé dès 2005 la nécessité d’en finir avec le capitalisme et de lutter pour le socialisme – au Venezuela et à l’échelle mondiale. Prévoyant la victoire électorale de Maduro, lors de l’élection présidentielle du 14 avril, Hubert a conclu en expliquant que la révolution vénézuélienne ne pourrait vaincre sans aller jusqu’au socialisme – un point qui a été discuté et approuvé par les camarades présents.
La guerre au Mali
Enfin, la troisième soirée était consacrée à la guerre au Mali. C’est Julie Costes, du PCF d’Alès, qui s’est chargée d’introduire les débats. D’emblée, elle a expliqué que « la vérité est toujours la première victime d’une guerre impérialiste ». L’intervention française au Mali ne fait pas exception. Julie a démontré que l’objectif officiel de cette guerre (la « lutte contre le terrorisme ») avait pour fonction de cacher ses véritables objectifs, à savoir la protection des intérêts des grandes multinationales françaises implantées dans cette région très riche en matières premières (or, pétrole, uranium).
La position de la direction du PCF, qui a apporté un soutien critique – mais un soutien tout de même – à l’intervention française, a été vivement discutée. Julie a notamment expliqué qu’au lieu de s’accrocher au char de l’impérialisme, la direction du PCF aurait pu et dû défendre un programme de classe et internationaliste : expropriation, en France, des avoirs des capitalistes qataris (qui arment les Islamistes) ; arrêt immédiat des ventes d’armes françaises à tous les régimes qui appuient des milices réactionnaires ; nationalisation des grands groupes capitalistes qui pillent le continent africain, etc.
Comme d’habitude, chacune des trois soirées s’est terminée par un magnifique banquet révolutionnaire. Le « sanglier en sauce aux pois chiches », notamment, marque un homme à vie. Mais tout était excellent et s’est déroulé dans une ambiance très fraternelle. La prochaine édition se tiendra probablement fin 2013