La question des OGM se pose aujourd’hui à tous, tant ses implications économiques, sociales et écologiques sont importantes. Nés dans les années 70 avec la transgénèse, les OGM quittèrent le laboratoire pour gagner l’industrie dans les années 80 (fabrication peu coûteuse de l’insuline humaine). Puis, dans les années 90, une industrie florissante se développa, avec la création de nombreuses variétés de plantes transgéniques. Après les paillasses et les incubateurs de l’industrie, les OGM passaient dans les cultures en plein champ.
Les OGM végétaux sont, pour la plupart, des plantes qui résistent aux herbicides (72 % des superficies ensemencées en OGM, soit 58,6 millions d’hectares). Les agriculteurs peuvent alors arroser leur champ avec un seul herbicide pour tuer les mauvaises herbes, sans nuire aux cultures.
De même, des OGM produisent leur propre insecticide, ce qui permet de réduire l’apport de produits chimiques. Cependant, les insectes se retrouvant continuellement en contact avec le même agent toxique sécrété par la plante, il existe un risque de voir apparaître des insectes résistants. Par conséquent, l’effet bénéfique risque de se réduire progressivement.
Certains défenseurs des OGM avancent parfois l’idée que leur culture massive permettrait de réduire la famine dans le monde. Pure hypocrisie. En 1990, déjà, la FAO soulignait que l’accroissement de la production alimentaire dépasse de 50% celui de la population. Les problèmes de malnutrition sont liés aux ravages économiques, sociaux et militaires que provoque le système capitaliste. Les pays capitalistes occidentaux utilisent d’ailleurs l’arme alimentaire pour maintenir l’humanité sous leur dépendance.
Depuis peu, les OGM sont devenus des « plantes usines » qui permettent de soigner des allergie, de réduire l’apport en cholestérol et, surtout, de soigner des maladies rares comme la Mucoviscidose. Cependant, de plus en plus de chercheurs sont sceptiques. Ils constatent que les pollutions génétiques sont inévitables - qu’il s’agisse d’erreur, d’accident, de malveillance ou de dissémination. La vente par Syngenta, entre 2001 et 2004, d’un maïs non autorisé, sans que l’entreprise « s’en aperçoive », n’en est que la dernière illustration.
L’Académie Nationale des Sciences, aux Etats-Unis, remarque que « des plantes et des animaux transformés pour produire des médicaments peuvent être nocifs pour les êtres humains et les autres espèces qui les consommeraient accidentellement ». En 2002 déjà, aux Etats-Unis, 500 000 tonnes de soja ont été saisies, car elles avaient été polluées par un maïs produisant un vaccin porcin de l’entreprise Prodigene.
Comment comprendre, devant tant de faits troublants, l’engouement des capitalistes et de leurs politiciens pour la culture d’OGM ? En fait, la question se ramène simplement à celle-ci : les OGM dans l’intérêt de qui ? Ils sont en effet un véritable Eldorado pour une demi-douzaine de grands groupes capitalistes mondiaux : Monsanto, Novartis, Dupont de Nemours, Aventis, Rhône Poulenc, Agrevo ou Zeneca. Leurs semences sont dans les catalogues d’achat par lesquels les agriculteurs doivent obligatoirement passer. Ils sont brevetés, ce qui interdit aux agriculteurs de replanter le fruit de leur récolte comme ils le faisaient depuis des siècles. Désormais, seules quelques multinationales, qui ont breveté certaines capacités naturelles des plantes, décident souverainement de leur usage.
La technologie ouvre la possibilité d’une meilleure qualité de vie pour l’humanité toute entière. Mais la question est de savoir quelle classe contrôle la technologie.
Ces grands groupes sont d’autant plus puissants qu’ils vendent en « kit » des produits associés à l’OGM. Les sept premiers vendeurs de pesticides, dans le monde, sont justement Novartis, Monsanto, Rhône Poulenc, Dupont de Nemours, Agrevo, Zeneca et Bayer. Ces grands groupes s’approprient des ressources jusqu’alors partagées par tous, et dépossèdent l’humanité des facultés de reproduction et de multiplication du vivant. Leur dernière trouvaille consiste à mettre sur le marché des plantes qui ne peuvent pas se reproduire, grâce au fameux gène « Terminator », ce qui impose aux paysans un rachat annuel et une soumission totale au marchand.
Les paysans sont de plus en plus coincés entre les firmes agrochimiques, qui leur fournissent les semences, et la grande distribution, qui fixe les prix de vente. Sous prétexte d’améliorer l’accès du tiers monde à une alimentation abondante et de qualité, le développement des OGM entraîne des coûts supplémentaires insupportables pour beaucoup. Aux Etats-Unis, malgré des récoltes record, on assiste à des faillites en masse du fait de l’augmentation des coûts.
Le marxisme, à la différence des théories rétrogrades de la « décroissance », n’inculque pas la peur des évolutions technologiques. Nous savons que la force motrice du progrès social et économique réside dans la science et la technologie. La technologie ouvre la possibilité d’une meilleure qualité de vie pour l’humanité toute entière. Mais la question est de savoir qui, ou plus exactement quelle classe contrôle la technologie. Contrairement à ceux qui ne voient dans le marxisme que l’apologie du productivisme, nous ne saurions dénigrer les OGM dans l’absolu. Mais nous sommes contre l’utilisation des OGM dans le seul but d’augmenter les profits et la puissance des grands groupes du secteur agro-alimentaire.
Le socialisme ne signifiera pas la démantèlement de l’agriculture industrielle, qui seule a permis de sortir les pays développés des pénuries et des famines. Il s’agit, par contre, de la soumettre au contrôle et à la gestion démocratique des travailleurs. Dans le respect de l’environnement, la technologie agro-alimentaire pourrait ainsi véritablement servir les intérêts de l’humanité et abolir, pour commencer, la famine et la malnutrition dans le monde. Seul la réalisation du socialisme, par lequel la production alimentaire sera libérée de la domination des grands groupes et de la loi du profit, permettra d’harmoniser consciemment les intérêts de l’humanité avec les exigences de la préservation de la nature et des grands équilibres écologiques.
Nous ne sommes pas étrangers à la nature. Nous en sommes inséparables. Comme l’écrivait Friedrich Engels en son temps, « plus les hommes non seulement sentiront, mais sauront à nouveau qu’ils ne font qu’un avec la nature, et plus deviendra impossible cette idée absurde et contre nature d’une opposition entre l’esprit et la matière, l’homme et la nature, l’âme et le corps... »