Le « rapport Pêcheur » sur la Fonction Publique était très attendu par les organisations syndicales : il fait un constat accablant sur la gestion des plus de 5 millions d’agents fonctionnaires et contractuels des 3 Fonctions Publiques (Fonction Publique d’Etat, Territoriale et Hospitalière).

Le rapport prétend défendre la Fonction Publique et ses agents en affirmant que « les services publics ne sont pas une exception vouée à l’extinction, mais une valeur d’avenir », en soulignant la pertinence du Statut Général de la Fonctions Publique de carrière et en dénonçant le fait que la RGPP (Révision Générale des Politiques Publiques) et la REATE (Réforme de l’Administration Territoriale de l’Etat) ont été « conduites à marche forcée ».

Cependant, les solutions proposées sont inacceptables, car envisagées dans le cadre dévastateur des politiques d’austérité ! En voici un exemple : « S’il y a trop de fonctionnaires il faut en réduire le nombre et non pas les sous-payer » – alors que le manque d’effectifs mine l’ensemble de la fonction publique !

La critique de la politique salariale rejoint largement celle des syndicats. Le rapport évoque une « fonction publique sous-développée » et des politiques salariales « conduites sans perspectives d’ensemble, privilégiant les revalorisations catégorielles, comme le recours aux leviers indemnitaires (primes), conduisant à une progressive érosion de la grille des rémunérations ».

Il constate également que « les salaires nets moyens en euros constants ont baissé entre 2010 et 2011 ». Il suggère que « le blocage de la valeur du point ne saurait dans la durée tenir lieu de politique salariale ». Le rapport montre comment cette mesure aboutit à un écrasement de la grille des salaires. En effet, pour se conformer à la loi, les indices du bas de la grille ont été revalorisés tandis que les indices des échelons et grades plus élevés ont stagné. A ce rythme, avertit le rapporteur, le SMIC talonnera le bas de la grille de la catégorie A (la plus élevée) d’ici 2017 !

Le rapport dénonce également la place « trop élevée » prise par les primes dans la rémunération globale (18 % en moyenne dans la Fonctions Publique Territoriale), « sources d’inégalités difficilement justifiables »…

Les organisations syndicales attendaient des propositions audacieuses, mais ce rapport s’inscrit dans la situation existante : malgré sa critique du « gel » du point d’indice, par exemple, Bernard Pêcheur refroidit aussitôt les ardeurs à le débloquer en notant qu’une augmentation de 10 % de sa valeur « représente un coût de 1,8 milliard d’euros pour les trois fonctions publiques ».

D’autres contradictions émaillent ce rapport. Alors qu’il explique comment la fusion des corps a été mal perçue par les agents, Bernard Pêcheur propose de… relancer la fusion des corps ! Alors qu’il dénonce le recours important aux non-titulaires, il propose juste de rendre ce recours plus lisible, la résorption de la précarité se faisant via l’intérim !

De même, alors que le rapport est clair sur « le désordre induit dans les rémunérations par cette même désindexation », il suggère « d’écarter toute forme d’indexation, mais de suivre l’évolution générale du pouvoir d’achat, de sorte que les fonctionnaires ne soient ni favorisés ni décrochés par rapport aux salariés du secteur privé » !

D’une façon générale, le rapport n’interroge pas les besoins des usagers, ni la manière de les associer aux décisions à prendre.

Même si la ministre Marylise Lebranchu affirme ne pas se sentir liée aux conclusions de ce rapport, il y a fort à parier que les préconisations du ministère de la Fonction Publique ressembleront beaucoup à celles de Bernard Pêcheur !

La CGT exige l’ouverture de négociations sur tous ces sujets. Mais comment espérer gagner sans une mobilisation massive des fonctionnaires ?

 

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