En 2021, Macron a annoncé un grand plan d’investissements publics de 54 milliards d’euros, « France 2030 », qui vise à « réindustrialiser » l’économie française, pour la rendre plus compétitive sur le marché mondial et ainsi développer « l’indépendance environnementale, industrielle, technologique, sanitaire et culturelle » du pays. En pratique, il s’agit essentiellement d’injecter des milliards d’euros d’argent public dans les caisses des entreprises privées.
« Transports du futur » et médicaments Made In France
Le plus gros poste du budget (12 milliards d’euros) doit être injecté dans le secteur de l’énergie « décarbonée » et dans ce que le plan appelle les « transports du futur », c’est-à-dire plus prosaïquement les voitures électriques ou hybrides. L’Etat a par exemple financé à hauteur de 903 millions d’euros la construction d’une méga-usine de batteries dans le Pas-de-Calais, pour le compte d’un conglomérat regroupant TotalEnergies, Stellantis et Mercedes-Benz.
La Santé figure aussi en bonne place parmi les secteurs visés. France 2030 prévoit par exemple 3 milliards d’euros de financement pour la production de médicaments biologiques Made In France. Alors que la pandémie de COVID est encore dans toutes les mémoires et que le pays est touché par une pénurie de médicaments, on comprend que le gouvernement ne tarisse pas d’annonces sur ses investissements dans ce domaine.
Il est pourtant peu probable que ces investissements massifs règlent quoi que ce soit à l’actuelle pénurie de médicaments. Celle-ci est causée en grande partie par le fait que les industriels du secteur pharmaceutique bénéficient d’une situation de monopole et retiennent dans leurs entrepôts une partie de leurs stocks pour faire monter les prix. France 2030 va investir des fortunes dans la recherche, mais cela ne fera que fournir aux capitalistes du secteur de nouveaux brevets sur lesquels spéculer.
Des cadeaux massifs au secteur privé
L’exemple des médicaments illustre bien l’impasse que représente France 2030. Le gouvernement prétend que ce plan va créer des centaines de milliers d’emplois et aider à relancer l’économie, mais ses seuls arguments se résument à l’idée qu’il suffirait d’injecter des quantités faramineuses d’argent public dans les caisses du secteur privé, soit directement, soit en construisant des infrastructures, pour que les patrons investissent à leur tour et créent des emplois.
C’est la même logique qui se trouvait derrière le fameux « Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi » (CICE) adopté par le gouvernement Ayrault en 2013, notamment sur l’inspiration du jeune conseiller Emmanuel Macron (déjà). Entre 2013 et 2019, 20 milliards d’euros avaient été investis chaque année sans autre résultat que de faire grossir l’endettement public.
La réalité est que les capitalistes n’investissent dans la production industrielle que s’ils estiment que cela leur sera profitable. Or, la conjoncture économique ne les y incite pas. La crise économique resserre la demande. La France vient d’éviter de justesse de basculer dans la récession. Dans un tel contexte, les capitalistes n’ont aucune envie de produire des marchandises qu’ils ne sont pas sûrs de pouvoir vendre. Plutôt qu’investir, ils préfèrent spéculer en bourse. C’est ce qui explique les records que bat le CAC 40 ces derniers temps.
Par ailleurs, ce plan de relance ne prévoit que de financer un certain nombre de nouveaux projets sans s’occuper de maintenir ou développer les industries déjà existantes. Sur son site internet, le ministère de l’Economie affirme que, grâce à France 2030, 40 000 emplois ont été « créés »… ou « maintenus ». On appréciera le flou artistique qui empêche de savoir combien ont réellement été créés et combien ont disparu dans le même temps. Le groupe Stellantis, qui hérite par exemple d’une usine de batteries flambant neuve, va créer avec elle moins d’emplois qu’il ne prévoit d’en supprimer en fermant ses anciennes usines de moteurs thermiques ! Plus généralement, c’est près de 900 000 emplois qui ont été détruits depuis 20 ans dans l’industrie française, tandis que se pérennisait une couche importante de salariés industriels intérimaires et précaires.
Quant à la défense de l’environnement, présentée comme un des grands objectifs de France 2030, c’est une fumisterie. A titre d’exemple, le volet « Transports du futur » est presque exclusivement consacré aux voitures individuelles, qui sont gourmandes en terres rares et difficiles à recycler, et ne prévoit aucun investissement dans le transport ferroviaire, qui n’est pas rentable du point de vue des capitalistes.
Derrière les grands discours du gouvernement, France 2030 se résume en réalité à une nouvelle injection massive d’argent public dans les caisses du privé. Parallèlement, pour compenser l’endettement public généré en partie par ces cadeaux au patronat, le gouvernement multiplie les annonces de plans d’austérité et les contre-réformes. Ce sont donc les travailleurs qui vont devoir se serrer la ceinture pour payer la facture de France 2030 !
Pour véritablement « réindustrialiser » tout en défendant l’emploi, ses conditions de vie et l’environnement, la classe ouvrière doit arracher aux capitalistes les leviers de commande de l’économie et planifier elle-même ce qu’elle a besoin de produire !