Le 25 mai prochain, les électeurs devront choisir les députés qui siégeront au Parlement européen. En France, le Front de gauche défendra des listes réunissant notamment le PCF et le Parti de Gauche. Alexis Tsipras, dirigeant de Syriza, en Grèce, est par ailleurs candidat à la présidence de la Commission européenne pour le Parti de la Gauche Européenne, qui rassemble des formations hostiles aux politiques d’austérité : Front de gauche, Izquierda Unida (Espagne), Die Linke (Allemagne), PRC (Italie), etc.
La Riposte appelle à voter pour les listes du Front de gauche. Les députés sortants du Front de gauche n’ont eu de cesse de dénoncer toutes les contre-réformes imposées par la Commission et votées par la majorité de droite du Parlement européen.
Chômage et pauvreté
Ce ne sont pas les reculs sociaux qui manquent en Europe, en ce moment. Les politiques d’austérité, couplées aux mécanismes meurtriers du capitalisme, ont provoqué une explosion sans précédent du chômage et de la pauvreté dans toute l’Union Européenne. Actuellement, 26,2 millions de travailleurs sont au chômage dans les 28 États membres. Parmi eux, on dénombre 5,54 millions de jeunes de moins de 25 ans, soit un chômeur sur cinq. Dans les pays du sud de l’Europe, les jeunes représentent un chômeur sur deux, voire plus : 49,2 % en Croatie, 54,3 % en Espagne et 59,2 % en Grèce. Dans le cas de la Grèce, l’austérité imposée par le FMI, la BCE et la Commission Européenne est responsable d’un appauvrissement généralisé de la population et d’une crise sanitaire très grave.
Ces horreurs s’expliquent par la crise la plus grave qu’ait connue le capitalisme au niveau mondial depuis 1929. Outre la crise de surproduction, l’économie européenne souffre d’une explosion des volumes de crédits. Les États, surtout du sud de l’Europe, connaissent une crise de solvabilité qui met en danger tout l’édifice européen. Au premier trimestre 2013, la Grèce devait aux banques 160,5 % de son PIB, l’Italie 130 % et le Portugal 127,2 %. Dans de telles proportions, la dette sera impossible à rembourser et tenter de freiner son augmentation suppose de couper drastiquement dans toutes les dépenses et de privatiser ce qu’il reste d’entreprises publiques.
Lutte des classes
Les travailleurs n’ont pas manqué de réagir. En Grèce, il y a eu de nombreuses grèves générales de 24 ou 48 heures, depuis 2010. En Espagne, les Baléares ont connu fin septembre 2013 une très importante mobilisation rassemblant près de 100 000 personnes. Plus récemment, la gigantesque « marche de la dignité » a fait trembler le pouvoir espagnol. Au Portugal, 500 000 personnes se sont rassemblées à Lisbonne le 2 mars 2013. A la fin de la manifestation, les travailleurs ont entonné l’hymne de la révolution de 1974. Cette humeur combative n’est certes pas répandue dans toute l’Europe, à ce stade. Mais la situation des travailleurs et des classes moyennes européennes s’aggrave de jour en jour. A un certain stade, cela finira par se traduire sous la forme d’immenses mobilisations sociales dans des pays jusque-là moins touchés par la crise, nous n’en sommes qu’aux prémisses. Par exemple, l’Allemagne a déjà connu une mobilisation de 50 000 fonctionnaires, le 25 mars 2014, dans plusieurs villes du pays, pour demander une hausse des salaires dans la fonction publique.
« Europe sociale » ?
En France, le PS défend l’idée d’une « Europe sociale » – sur la base du capitalisme. C’est impossible. Cela suppose que les intérêts des travailleurs et ceux des capitalistes puissent être conciliables. D’ailleurs, la politique de François Hollande suffit à démontrer qu’il n’en est rien : elle est au service exclusif de la classe dominante : le dernier exemple en date n’est autre que le scandaleux « pacte de responsabilité » qui offre 30 milliards d’euros au patronat.
Certains courants de gauche – notamment au sein du PCF – proposent de sortir de l’Union Européenne et d’en revenir à une monnaie nationale. Ce programme n’est que le versant nationaliste des illusions réformistes sur « l’Europe sociale ». Dans le cadre du capitalisme, de telles mesures ne feraient qu’aggraver la crise économique et donc la situation des travailleurs en France. Par exemple, le renforcement des barrières douanières aux frontières du pays entraînerait des mesures de rétorsion qui pénaliseraient les exportations françaises. Qu’est-ce que les salariés auraient à y gagner ?
Malgré ses prises de position vigoureuses contre l’austérité, le Front de gauche s’arrête au seuil de la propriété capitaliste des banques et des grands leviers de l’économie. Il demande une hausse des salaires et un pouvoir accru des syndicats au sein des entreprises, mais sans répondre à la question : comment empêcher les patrons de geler les investissements ou de faire sortir ses capitaux du pays ? Faute de proposer des mesures d’expropriation des capitalistes, le programme du Front de gauche n’est qu’une version plus à gauche de « l’Europe sociale » – sur la base du capitalisme – que défend le PS. Il est tout aussi inapplicable.
Le programme du Front de gauche aurait un impact autrement plus considérable, sur le moral des travailleurs, en mettant en cause la racine du problème, à savoir la propriété capitaliste des moyens de production. En définitive, l’alternative à l’Europe capitaliste reste une « Fédération des États Socialistes d’Europe », telle que défendue par la Troisième Internationale lorsqu’elle était dirigée par Lénine et Trotsky. Un tel programme, patiemment expliqué aux travailleurs, donnerait une expression politique aux mobilisations sociales pour faire passer le socialisme et l’internationalisme de la théorie à la pratique.
R. B. (PCF Paris)