D’après Der Kommunist


En Allemagne, plusieurs élections régionales tenues en septembre ont marqué une profonde aggravation de la crise politique du capitalisme allemand. Le 1er septembre, le parti d’extrême droite « Alternative pour l’Allemagne » (AfD) a remporté les élections dans les Lander de Saxe et Thuringe, face au parti traditionnel de la bourgeoisie allemande, les Chrétiens Démocrates (CDU), et aux partis de la coalition gouvernementale, les Sociaux-Démocrates (SPD), les Verts, et les Libéraux. Le 22 septembre, le SPD ne l’a emporté que de justesse face à l’AfD dans le Land de Brandebourg, pourtant fief historique de la social-démocratie et région d’origine du chancelier Olaf Scholz.

La crise du capitalisme allemand

L’économie allemande ne s’est toujours pas remise de la crise. La guerre en Ukraine, en particulier l’impossibilité d’accéder au gaz à bon marché en provenance de Russie, n’ont fait qu’aggraver l’impasse dans laquelle est plongée le capitalisme allemand. La production s’est effondrée dans des secteurs clés comme l’automobile et la chimie, tandis que le prix de l’énergie augmente et que les ventes baissent sous les coups de la concurrence des entreprises chinoises et américaines.

Alors que la classe ouvrière subit encore les effets de l’inflation, cette crise fait planer la menace de licenciements massifs. L’entreprise Volkswagen a par exemple annoncé qu’elle envisageait de fermer certaines de ses usines en Allemagne, ce qui n’était pas arrivé depuis des décennies. En continuant à s’aggraver, le déclin de l’économie allemande ne peut que pousser les travailleurs allemands à entrer en lutte pour défendre leurs salaires et leurs conditions de vie.

Dans ce contexte propice à l’intensification de la lutte des classes, la bourgeoisie allemande a besoin d’un parti sûr au gouvernement, pour imposer les politiques de rigueur dont elle a besoin. Or, elle ne fait pas confiance à l’AfD, qui s’est opposé à la guerre en Ukraine, mais aussi à l’UE et à l’Euro - deux piliers de l’impérialisme allemand en Europe – et qui critique de façon démagogique les politiques d’austérité, en en rejetant la responsabilité sur l’immigration.

Démagogie et hypocrisie

C’est cela qui explique la campagne de propagande lancée par la classe dirigeante contre l’AfD. La presse, les entreprises, et les universités ont multiplié les dénonciations contre le parti d’extrême droite, qu’elles ont accusé de préparer des rafles et des déportations massives. Les institutions de la bourgeoisie ont même appelé à des manifestations contre l’AfD et pour « défendre la démocratie ». Dans le même temps, l’Etat a aussi mobilisé son appareil répressif et a ouvert des poursuites judiciaires contre certains membres de l’AfD accusés d’être payés par la Russie ou la Chine.

Rien de tout cela n’a eu d’impact durable sur la croissance de l’AfD. La classe ouvrière s’est globalement tenue à l’écart de cette campagne, qui est orchestrée précisément par les institutions qui sont responsables de l’aggravation de ses conditions de vie.

Si l’hypocrisie de cette campagne de la bourgeoisie en faveur du « vivre-ensemble » n’était pas assez évidente, elle l’est devenue cet été. Après une attaque terroriste à Solingen fin août, les partis bourgeois et la presse capitaliste ont subitement entamé une nouvelle campagne de propagande, dirigée cette fois contre les immigrés et les musulmans. Le gouvernement de coalition a notamment fait passer une série de lois qui durcissent drastiquement l’obtention du droit d’asile. La classe dirigeante est donc en train d’instaurer le cadre légal nécessaire à des expulsions massives, précisément ce qu’elle accusait l’AfD de préparer !

Pour une politique de classe !

L’AfD a beau être critiqué férocement par la classe dirigeante, ce parti réactionnaire n’en est pas moins un fervent partisan des politiques d’austerité, du soutien à Israël et au génocide des Gazaouis, et des cadeaux fiscaux aux milliardaires et aux grandes entreprises. L’AfD est un ennemi de la classe ouvrière, qu’il cherche à diviser par une démagogie raciste.

L’AfD n’a pas été le seul parti à progresser durant les élections de septembre. Cela a aussi été le cas de l’« Alliance Sahra Wagenknecht » (BSW). Cette scission récente du parti réformiste de gauche Die Linke se caractérise par un programme confus, qui mêle la revendication d’aides supplémentaires aux petites entreprises à une démagogie raciste dirigée contre les immigrés. Le BSW est arrivé troisième en Saxe et en Thuringe, derrière l’AfD et la CDU, mais devant le SPD, les Verts, les Libéraux et Die Linke. En Brandebourg, le BSW est à nouveau arrivé troisième, derrière le SPD et l’AfD.

Les succès de l’AfD et du BSW marquent avant tout le rejet massif des partis du statu quo, qu’il s’agisse de la CDU, qui a dirigé l’Allemagne de 2005 à 2021, ou du SPD, des Libéraux et des Verts qui gouvernent aujourd’hui. Durant toute cette période, la politique gouvernementale est restée peu ou prou la même et n’a profité qu’aux grandes entreprises. Quant à Die Linke, il paie le prix de son soutien aux politiques d’austérité que le SPD applique dans plusieurs Lander.

Après plusieurs décennies de stabilité, toutes les contradictions du capitalisme allemand sont en train de remonter à la surface et font trembler la classe dirigeante. La classe ouvrière allemande ne doit placer aucune confiance dans les partis au service de la bourgeoisie, qui ne prétend défendre la « démocratie » que pour protéger ses profits. Elle ne doit rien attendre non plus de la démagogie réactionnaire de l’AfD ou de l’opportunisme raciste du BSW, qui cherchent à détourner la colère des masses contre les immigrés pour défendre le capitalisme allemand. Seule une politique révolutionnaire de classe, sur la base d’un programme communiste peut mettre fin à l’austérité et à l’exploitation.

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