Article écrit le 25 septembre.


Depuis le 23 septembre, l’aviation israélienne soumet le sud du Liban à un déluge de bombes. Des centaines de civils ont déjà été tués et des milliers d’autres blessés. Ce carnage vient s’ajouter au génocide perpétré depuis un an contre les Palestiniens de Gaza. Plus de 40 000 Gazaouis ont déjà été tués d’après les chiffres officiels – qui sont sans doute largement en dessous de la réalité, car de nombreux corps sont encore enterrés sous les décombres des villes et des villages de Gaza. En attaquant aujourd’hui le Liban et en multipliant les provocations, le gouvernement israélien cherche à entraîner le Moyen-Orient dans une guerre généralisée, avec la complicité des puissances impérialistes occidentales.

Contradictions en Israël

La guerre contre Gaza s’est révélée être une impasse pour le gouvernement israélien, qui n’a pu atteindre aucun de ses objectifs. Les otages du Hamas n’ont pas été libérés. Plusieurs ont d’ailleurs été tués par les forces israéliennes elles-mêmes. Malgré un déluge de feu et une succession de crimes de guerre contre les civils gazaouis, l’armée israélienne n’a pas éradiqué le Hamas. Celui-ci a subi des coups très durs, mais ses combattants résistent toujours. Sur le plan politique, la guerre les a même renforcés. Des dizaines de milliers de jeunes palestiniens souhaitent aujourd’hui rejoindre le Hamas pour venger les souffrances abominables infligées aux Gazaouis par l’armée israélienne.

Cet échec a accentué les divisions qui existaient dans la classe dirigeante et l’appareil d’Etat israéliens. Une partie conséquente de la grande bourgeoisie et des dirigeants sionistes, dont le ministre de la Défense Yoav Gallant, veut arrêter les frais et mettre fin à la guerre, ne serait-ce que provisoirement, pour essayer de restaurer la stabilité dont l’économie israélienne a besoin. Ce serait aussi l’occasion de réorganiser et de remettre sur pied l’armée israélienne, car ils estiment qu’elle est trop épuisée et dispersée pour pouvoir attaquer à la fois Gaza, la Cisjordanie et le Liban. Mais les éléments les plus radicaux du sionisme, comme le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir, veulent continuer la guerre à tout prix. Ils rêvent d’expulser ou d’exterminer le plus possible de Palestiniens en vue d’annexer définitivement la bande de Gaza et la Cisjordanie. C’est sur ces « ultras » que s’appuie Netanyahou pour conserver sa fragile majorité gouvernementale. Il a ses propres raisons, toutes personnelles, de prolonger la guerre, et même l’étendre à toute la région. Il sait que lorsqu’elle finira, il y aura des élections : il perdra alors son poste de Premier ministre et devra répondre devant la Justice de plusieurs affaires de corruption, qui pourraient le mener en prison. Pour éviter ce scénario, il est prêt à plonger l’ensemble du Moyen-Orient dans le chaos.

Provocations

C’est pour cette raison que Netanyahou a consciencieusement saboté les négociations pour un cessez-le-feu à Gaza. Début juillet, dans le cadre de négociations parrainées par les Etats-Unis, le Hamas avait accepté les conditions posées par Israël pour une cessation temporaire des combats en échange de la libération des otages. Netanyahou a alors imposé de nouvelles conditions, avant de faire assassiner le principal négociateur du Hamas ! Depuis, les négociations sont au point mort, car le Hamas refuse de signer de nouveaux accords que Netanyahou déchirerait aussitôt.

La guerre s’est aussi étendue à la Cisjordanie. Après le 7 octobre 2023, le gouvernement israélien a donné carte blanche aux colons sionistes établis dans la région. Ceux-ci ont alors multiplié les raids meurtriers contre des villages palestiniens, pour en chasser les habitants et s’emparer de leurs terres. L’armée israélienne a aussi mené de sanglants assauts contre des villes et des camps de réfugiés palestiniens. Une vidéo a récemment fait scandale en Israël : on y voyait des soldats israéliens jeter les corps de Palestiniens tués depuis le toit d’un immeuble de Jénine.

Parallèlement, le gouvernement israélien a lancé une série de provocations contre l’Iran pour tenter de pousser ses dirigeants à déclarer la guerre à Israël. En juin, l’ambassade d’Iran en Syrie a été bombardée par l’aviation israélienne. En août, un dirigeant du Hamas a été assassiné en plein Téhéran. La réaction de l’Iran a été relativement mesurée. Le fait est que les dirigeants iraniens n’ont aucune envie de se retrouver impliqués dans une guerre régionale qui les confronterait aux Américains. Après le bombardement de son ambassade, l’Iran a demandé à l’ONU de condamner la frappe israélienne, mais cette demande s’est heurtée au veto des Britanniques, des Français et des Américains. Les forces armées iraniennes ont alors tiré une importante salve de missiles et de drones vers Israël, mais en prévenant au préalable les Occidentaux. Ceux-ci ont donc pu abattre la plupart des projectiles avant même qu’ils n’atteignent l’espace aérien israélien.

Complicités impérialistes

Les impérialistes occidentaux – Etats-Unis en tête – sont plongés dans de profondes contradictions. Ils n’ont aucune envie que la guerre à Gaza ne débouche sur une confrontation générale au Moyen-Orient, qui serait catastrophique pour l’économie mondiale et pour leurs propres intérêts dans la région. L’Iran dispose de nombreux relais et alliés – notamment en Irak, au Liban et au Yémen – mais aussi d’une armée puissante et d’un vaste arsenal de missiles et de drones. Il suffit d’observer l’impact qu’ont eu les attaques des Houthis yéménites sur le commerce mondial pour imaginer ce que signifierait une guerre régionale impliquant l’Iran. Les Occidentaux en sont bien conscients et observent donc avec inquiétude les provocations de Netanyahou. Joe Biden, Emmanuel Macron et Keir Starmer ont même exprimé de timides réserves sur le comportement du gouvernement israélien.

C’est d’autant plus le cas que la Russie et la Chine sont de plus en plus présentes au Moyen-Orient. La Russie, qui a des troupes en Syrie et en Libye, se rapproche de plus en plus de l’Iran, tandis que la Chine joue un rôle diplomatique croissant dans la région. Si un conflit devait éclater, la Chine et la Russie interviendraient forcément, d’une façon ou d’une autre, et cela ne ferait pas du tout les affaires des Américains.

Ceci étant, les impérialistes occidentaux ne peuvent pas abandonner Israël à son sort. Ces dernières années, plusieurs anciens alliés fidèles de Washington dans la région, comme la Turquie ou l’Arabie Saoudite, ont profité de l’affaiblissement de l’impérialisme américain pour adopter une politique plus « indépendante ». Israël reste donc le seul allié solide des impérialistes occidentaux au Moyen-Orient. C’est cela qui explique que ceux-ci continuent d’appuyer, de financer et d’équiper l’armée israélienne. Netanyahou en est bien conscient. Il sait que les remontrances de Biden et les larmes de crocodile de Macron n’ont aucune conséquence réelle. Quoi qu’il fasse, les Occidentaux le soutiendront et continueront à lui envoyer des armes et de l’argent, se rendant au passage complices du génocide des Gazaouis et de la guerre déclenchée contre le Liban.

L’impérialisme, c’est la guerre

Depuis le 7 octobre 2023, la tension n’a fait que monter à la frontière entre le Liban et Israël. Le Hezbollah a proclamé sa solidarité avec le Hamas et a tiré quelques salves de roquettes vers Israël, tout en affirmant qu’il cesserait ces tirs dès qu’un cessez-le-feu serait conclu à Gaza. Mais un tel scénario n’est pas dans l’intérêt de Netanyahou. L’armée israélienne a donc répondu à ces frappes limitées par une série d’attaques contre des dirigeants du Hezbollah, mais aussi contre des bâtiments civils. Près de 500 libanais ont été tués entre octobre 2023 et août 2024.

La situation a connu une aggravation dramatique, le 17 septembre, avec l’explosion simultanée des centaines de bipeurs – piégés par les services secrets israéliens – utilisés par des membres du Hezbollah ou d’ONG proches de cette organisation. Des dizaines de personnes, y compris des enfants, des infirmiers et de simples passants, ont été tuées dans ces attaques terroristes organisées par les services secrets israéliens. Le lendemain, une nouvelle vague d’attentats a fait des dizaines d’autres morts. Puis, le vendredi 20 septembre, une frappe aérienne contre un immeuble d’habitation en banlieue de Beyrouth a tué entre 50 et 70 personnes.

La réaction des impérialistes occidentaux face à ces actes terroristes a été d’une hypocrisie sans bornes. L’an dernier, après l’attaque du Hamas le 7 octobre, ils avaient mené une véritable chasse aux sorcières contre tous ceux qui n’avaient pas immédiatement « condamné le terrorisme » du Hamas. La ministre chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé, avait même annoncé que l’Etat couperait leurs subventions aux « associations qui ne sauraient pas caractériser ce qui s’est passé » le 7 octobre. Aujourd’hui, leur seule réaction a été de demander aux victimes de tendre l’autre joue.

Par exemple, le 21 septembre, Macron a publié une vidéo dans laquelle il s’adressait aux Libanais. Il les adjurait de « refuser la fatalité de la guerre » et affirmait qu’il était de la responsabilité des dirigeants libanais « d’agir en ce sens ». Il est difficile d’imaginer plus répugnante hypocrisie : alors que les bombes israéliennes pleuvent sur le Liban, Macron s’adresse aux Libanais pour leur dire de ne pas faire la guerre, comme si ce n’était pas Israël qui était en train d’attaquer le Liban. Toutes ces démonstrations de « pacifisme » ne sont qu’une tentative pathétique de dissimuler le soutien que l’impérialisme français continue d’apporter à la politique criminelle des dirigeants sionistes.

La guerre vers laquelle le régime de Netanyahou tente d’entraîner tout le Moyen-Orient serait une abominable boucherie. La responsabilité de cette situation retombe, en dernière analyse, sur les impérialistes occidentaux. Biden, Macron et leurs semblables auraient très facilement pu mettre fin au carnage déchaîné contre Gaza. Il leur aurait suffi de suspendre leur aide financière et militaire à Israël. Sans cet appui, l’armée israélienne serait incapable d’opprimer et de massacrer les Palestiniens. Les dirigeants occidentaux ne l’ont pas fait, car c’eut été contraire à leurs intérêts dans la lutte impérialiste pour des marchés et des sphères d’influence. Ce faisant, ils ont rendu possible le génocide des Palestiniens de Gaza ; ils ont aussi encouragé Netanyahou à semer la terreur au Liban et à faire planer le spectre d’une guerre régionale sur le Moyen-Orient.

Cette situation est une nouvelle démonstration sans appel du caractère meurtrier du capitalisme et de l’impérialisme. Ce système à l’agonie menace d’entraîner le monde entier dans la barbarie, dans une succession ininterrompue de guerres, de massacres et de génocides. La seule façon d’arracher l’humanité à cet abîme est de renverser le capitalisme et l’impérialisme.



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