En quittant le Parti Socialiste pour aller ramper devant Nicolas Sarkozy, Eric Besson a expliqué que ses idées n’ont pas changé. Cela devrait donner à réfléchir aux militants et aux électeurs du PS. Comme secrétaire national aux questions économiques, Eric Besson occupait un poste important dans le parti, et ses idées étaient tout à fait représentatives de celles de la direction actuelle du Parti Socialiste.
La défection de Besson est loin d’être un fait isolé. Elle est intervenue au moment où pratiquement tout l’entourage de Ségolène Royal était déjà à la recherche d’une entente avec l’UDF – un parti qui a soutenu pratiquement sans faille la politique ultra-réactionnaire mise en application depuis cinq ans. Entre les deux tours de l’élection présidentielle, Royal a annoncé qu’elle serait parfaitement disposée à nommer un Premier ministre issu de l’UDF, et de nombreux « pontes » du parti, réunis dans le soi-disant « groupe Spartacus », prônent ouvertement la formation d’une coalition PS-UDF.
Cette évolution droitière ne doit rien au hasard. Elle est une expression de la crise du réformisme. Ce qui caractérise le réformisme, c’est la recherche d’un « progrès social » qui laisse intact le pouvoir économique des capitalistes. Ce « compromis social » cadre parfaitement avec l’horizon étroit de ceux qui, dans la bureaucratie du Parti Socialiste, ont trouvé une « place au soleil », et dont le mode de vie et les mœurs sont beaucoup plus proches de ceux des capitalistes que de ceux des travailleurs, qu’ils prétendent représenter.
Cependant, à une époque où le capitalisme français est incapable de développer l’économie, où il perd du terrain sur les marchés mondiaux, où l’investissement stagne, où son existence est devenue incompatible avec les conquêtes sociales du passé, où il refoule la société en arrière dans tous les domaines – les bases économiques du réformisme n’existent plus. Par conséquent, le réformiste doit choisir son camp. Soit il abandonne ses projets de réforme sociale et adopte un programme fait de phrases creuses, comme celui de Royal – soit, s’il veut vraiment lutter pour faire avancer le sort des travailleurs et des jeunes, il est immédiatement confronté à la nécessité d’en finir avec le capitalisme.
Dans les années à venir, un clivage apparaîtra, dans le Parti Socialiste, entre ces deux orientations. Dans notre document Perspectives pour la France 2007, nous écrivions : « La caractérisation du PS avancée par différents groupes gauchistes, selon laquelle il s’agirait d’un parti de droite, n’est pas correcte. Au contraire, le PS est le principal parti du salariat. Mais il n’existe pas dans le vide. Il subit les pressions idéologiques et corruptrices du capitalisme, et ces pressions s’expriment avant tout au niveau de la bureaucratie municipale et parlementaire.
Le réformisme des militants de base est d’une autre nature que celui des dirigeants. Le militant réformiste a, certes, des illusions dans le capitalisme. Mais il a tout de même besoin de se sentir du côté du progrès et de la " justice sociale ". Les mobilisations syndicales et les protestations successives, dans le secteur privé comme dans le secteur public, attiseront les tensions et les clivages au sein du Parti Socialiste, et mèneront à un renforcement de l’aile gauche, jetant la droite du parti sur la défensive. »
La défaite de Royal portera un nouveau coup à l’autorité morale et politique de la direction actuelle du parti, et ouvrira une période de divisions internes. Dans les semaines et les mois à venir, la question d’une coalition avec l’UDF sera de nouveau à l’ordre du jour. Mais une importante minorité des militants socialistes s’opposera à cette orientation désastreuse, et peut-être même une majorité.
Le malaise, dans le PS, était déjà évident lors de la consultation interne sur la Constitution Européenne. 42 % des adhérents ont voté contre la position de la direction. Mais c’est la capitulation des représentants de la gauche du parti, les uns après les autres, qui a permis à l’aile droite de reprendre le dessus. Jean-Luc Mélenchon, Arnaud Montebourg, Vincent Peillon et Henri Emmanuelli ont tous capitulé et rallié la droite du parti. Manipulant cyniquement les militants qui plaçaient leur confiance en eux, ils ont renoncé à toute contestation pour ménager leurs propres ambitions personnelles.
Cet opportunisme abject a compliqué la formation d’une opposition de gauche sérieuse au sein du PS. Mais inévitablement, compte tenu des orientations de plus en plus ouvertement pro-capitalistes de la direction actuelle du parti, une nouvelle opposition verra le jour, tôt ou tard, dans le PS comme dans le MJS. La Riposte est vivement intéressée à entrer en dialogue avec tous ceux, dans le PS et le MJS, qui veulent défendre les idées et le programme du socialisme authentique dans leurs organisations respectives. Il faut débarrasser le PS de cette « cinquième colonne » [1] d’agents du capitalisme – les Besson, les Rocard, les Kouchner, les Allègre, etc. – qui changent de camp comme on change de trottoir, en fonction de leurs carrières et pour mieux défendre le système capitaliste. Ce système, le Parti Socialiste a été créé pour le combattre. Aux militants socialistes de remettre leur parti sur les rails de cette lutte !
[1] En 1936, pendant la guerre civile espagnole, le général faciste Emilio Mola expliquait qu’il avait quatre colonnes avançant sur Madrid, et une cinquième qui l’attendait à l’intérieur de la ville.