Les affaires vont bien pour l’entreprise ONET, le mastodonte français des services aux entreprises : il a réalisé 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2023. Depuis 2018, il a multiplié ses bénéfices par sept. Les salariés, eux, sont payés à peine au-dessus du SMIC. De fait, le leader du nettoyage doit son succès à la créativité dont il fait preuve pour exploiter et précariser ses 66 000 employés.
Sur le site du CHU de Montpellier, les travailleurs d’ONET chargés du nettoyage sont en grève illimitée depuis le 15 septembre. 70 % des salariés ont rejoint le mouvement. Ils revendiquent une augmentation de leurs salaires, une amélioration de leurs conditions de travail et le versement d’un 13e mois pour faire face à l’inflation.
Sur le piquet de grève, Khadija, agent de service et déléguée syndicale CGT, nous décrit comment les conditions de travail se sont détériorées suite à la mise en place, par la direction, d’un « dispositif de traçabilité et de pointage ». L’objectif est d’augmenter les cadences et le temps de travail des salariés, qui sont déjà surchargés. Pour arriver à ses fins, l’entreprise a mis en place un système lui permettant de contrôler en permanence le travail de ses employés. « Désormais les salariés doivent pointer avec leur téléphone à chaque fois qu’ils entrent dans une pièce à nettoyer », nous explique Khadija.
Les travailleurs dénoncent aussi la mise à pied de plusieurs de leurs collègues : « On a eu des salariés sur les sites extérieurs qui ont été mis à pied parce qu’ONET a perdu un chantier. Ils n’ont pas été replacés. Du coup ils se retrouvent sans revenus pendant un temps indéterminé ». Ce ne sont pas les seules mises à pied imposées par l’entreprise. Tout en augmentant les cadences et la charge de travail des salariés, la direction d’ONET a suspendu plusieurs travailleurs au motif que leur travail n’était pas d’une assez bonne « qualité ». Khadija pointe la responsabilité de l’entreprise : « La qualité ne suit pas parce qu’il n’y a pas de fiches de poste. Elle ne suit pas à cause de ce dispositif de traçabilité qui a été mis en place ».
Depuis plus de trois semaines, les grévistes tiennent bon. Après quatre séances de négociation, la direction a promis des « améliorations sur le dispositif de contrôle », mais refuse toujours toute concession sur les salaires et le 13e mois.
Concernant la possibilité d’un élargissement de la grève, Khadija explique : « On se sent soutenu par les salariés du CHU. Il y a une cagnotte qui a été ouverte et ils nous aident de diverses manières. Des personnels de l’hôpital sont venus nous soutenir le mercredi 13 septembre, mais pour l’instant ils ne sont pas entrés en grève. On essaie aussi de communiquer avec les salariés d’ONET au CHU de Purpan à Toulouse. On pense qu’ils subissent le même dispositif qu’ici et on les appelle à rejoindre notre mouvement. Si c’est pareil chez eux, qu’ils sachent qu’ils ne sont pas seuls et que nous sommes là en soutien ».