A l’EHPAD Saint Paul, géré par l’Ordre de Malte, je commence ma journée à 7 h du matin, jusqu’à 14 h 30. Je suis seule dans l’unité pour m’occuper de 12 résidents atteints d’Alzheimer.
Je lis les consignes de soins et les relevés d’incidents intervenus la veille et la nuit, puis préparation du petit déjeuner. Pendant que le café coule, je vais voir les résidents dans leur chambre. J’accompagne en salle à manger ceux qui sont réveillés, et je fais immédiatement la toilette de ceux qui en ont besoin.
J’installe le petit déjeuner et distribue les médicaments, en aidant ceux qui ne peuvent les prendre seuls. Aussitôt terminé, nettoyage des tables et vaisselle, puis je commence les toilettes à la chaîne (10 toilettes et 2 douches). Pendant que je suis dans une chambre, que font les 11 autres ? Je vous laisse imaginer : chutes, bagarres.
Toilettes finies, je descends le linge sale. Vient enfin la pause de 30 min – non rémunérée – pendant laquelle il faut descendre le chariot en cuisine pour récupérer les repas.
Je remonte le chariot et je fais chauffer le repas. Je mets la table et je distribue les médicaments. En fait, on écrase les médicaments et on donne des gouttes, alors que ce doit être un geste infirmier. Je sers le repas et j’aide les patients à manger. Je les accompagne ensuite au salon ou faire la sieste. Je fais la vaisselle et le ménage.
Enfin la collègue arrive. Je lui fais la relève et je pars en la laissant commencer les changes, laver les dents et accompagner les patients aux toilettes. La journée du soir se déroule à l’envers de celle du matin. Des couchers à la chaîne ne laissant pas le temps de rassurer le résident qui angoisse voyant la nuit arriver.
Nous sommes frustrées, épuisées physiquement, mais surtout moralement. Et les jours sont plus difficiles quand il faut gérer des chutes, des bagarres, des gastros ou des maladies.
Mon métier, c’est d’accompagner dans les gestes quotidiens de la vie. Mais quel accompagnement ? Je fais à leur place, par manque de temps. Je culpabilise : suis-je maltraitante ? Ne suis-je plus faite pour ce métier, que j’aime malgré tout ?
Du côté de la direction, pour réduire les salaires, on recrute du personnel jeune, non diplômé. On les épuise et on les dégoûte du métier. En plus, on les monte contre les « anciennes », qui coûtent trop cher et ne vont pas assez vite.
Tout cela est indécent et indigne pour les patients qui subissent cette situation !
Fabienne Martin (Saint-Etienne)