Thales Alenia Space (TAS), la filiale du groupe Thales consacrée à l’industrie spatiale, a récemment annoncé 1300 suppressions de postes en Europe, dont 1124 en France. Ce dernier chiffre représente 25 % des 4500 salariés de TAS en France. D’après la direction, cette « restructuration » devrait se traduire pour les salariés français par des mutations vers les autres entreprises du groupe Thales. Pour ce qui est des salariés employés sur des sites à l’étranger (Espagne, Grande-Bretagne et Belgique), ce sera des licenciements secs.

Les profits de l’armement

L’annonce de ce plan social est d’autant plus surprenante que pour satisfaire ses commandes actuelles, TAS aurait déjà besoin d’un effectif supérieur à celui dont elle dispose aujourd’hui. Officiellement, la direction prétend que ce choix lui est dicté par la baisse des ventes de satellites. Il est vrai que TAS perd de plus en plus de parts de marché, face à la concurrence d’entreprises américaines comme SpaceX, mais aussi chinoises ou indiennes.

Pourtant, ce déclin n’est pas une surprise et il n’était pas irrémédiable. Depuis des années, l’intersyndicale de l’entreprise exhorte en vain sa direction à s’adapter aux nouvelles évolutions technologiques, pour ne pas être distancée par la concurrence. Aujourd’hui, ce sont les travailleurs qui paient la facture des refus de leurs patrons.

L’attitude de la direction du groupe Thales s’explique simplement : elle a d’autres priorités bien plus rentables, avant tout dans ses branches liées à l’industrie de l’armement.

Les actions de Thales montent en flèche depuis le début de la guerre en Ukraine, sur fond de croissance mondiale des dépenses militaires. En 2022, les résultats du groupe ont battu des records, notamment grâce à l’achat par les Emirats Arabes Unis de 80 avions Rafale dont Thales fournit une partie de l’électronique de bord.

En 2023, Thales a enregistré une année de commandes record, des résultats principalement dus aux ventes d’armes. Un article des Echos soulignait ainsi que « sur les 25 “grands contrats” – d’une valeur supérieure à 100 millions d’euros – engrangés par Thales en 2023, 18 concernent le secteur de la défense » (« Thales : le carnet de commandes au plus haut historique », 5 mars 2023).

Les mutations de salariés sont une façon pour les dirigeants de Thales de se concentrer sur les secteurs les plus rentables du groupe. En annonçant ce plan social, ils envoient un message clair à leurs actionnaires : « Pas d’inquiétude ! Nous allons nous concentrer sur la fabrication d’armes ! » La réaction des marchés n’a pas tardé. Peu de temps après cette annonce, UBS (Union Bank of Switzerland) a relevé la note des actions de Thales, alors qu’elle l’avait baissée en février.

Nationalisation !

Le plus important site de TAS se trouve à Toulouse. 715 postes vont y être supprimés. Le 26 juin dernier, la CGT TAS y a organisé une assemblée générale, suivie d’un rassemblement le 28. Des travailleurs d’autres branches du groupe Thales, mais aussi d’Airbus Defense and Space, Météo France, CapGemini, ou encore Safran y ont participé pour témoigner de leur solidarité.

La CGT réclame le retrait pur et simple du plan social. Nous sommes d’accord. Il est hors de question que les salariés fassent les frais de la mauvaise gestion des patrons de l’entreprise. Mais cette revendication ne pourra pas être satisfaite de façon durable tant que l’entreprise sera soumise aux logiques du marché capitaliste et de la concurrence, qui font planer une épée de Damoclès sur l’avenir même de TAS.

Même si l’Etat reste l’actionnaire principal, la politique industrielle du groupe est orientée avant tout en fonction des intérêts des actionnaires privés. Il faut donc se mobiliser pour réclamer la nationalisation intégrale de Thales et de ses sous-traitants, sans compensations pour les actionnaires, et son passage sous le contrôle démocratique de ses salariés. C’est la seule façon d’assurer véritablement la pérennité de tous les emplois, en France et à l’étranger.

Par ailleurs, cette mobilisation doit être reliée à une lutte plus globale contre le capitalisme et le militarisme. Thales n’est pas exactement une entreprise comme les autres. Comme le reste de l’industrie de l’armement, elle fait des profits énormes grâce aux guerres causées par l’impérialisme.

En juin dernier, l’ONG Disclose a par exemple révélé que durant les premiers mois de 2024, Thales a envoyé en Israël des pièces détachées pour des drones qu’utilise l’armée israélienne pour bombarder la bande de Gaza. Cet envoi a été autorisé par le gouvernement français, malgré le génocide perpétré par l’Etat sioniste, et a dû rapporter gros aux dirigeants de Thales.

Il faut s’opposer à ces expéditions d’armes et, plus généralement, lutter pour la réorientation de l’entreprise vers une production socialement utile. Si Thales était nationalisée sous le contrôle de ses salariés, les compétences de ses travailleurs hautement qualifiés pourraient être utilisées pour servir les intérêts de la population – et non ceux d’une minorité de parasites qui fait des profits grâce au massacre de peuples entiers.

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