Depuis plusieurs mois, les employés du magasin de fournitures artistiques Rougier & Plé Filles du Calvaire à Paris luttent pour leurs droits et leurs conditions de travail, face à une répression brutale. Nous avons échangé avec Salomé, l’une des militantes de SUD-Commerces et Services à l’origine du mouvement.
Des conditions de travail dégradantes
Comme elle nous l’explique, dans ce magasin situé à deux pas de la Place de la République, les conditions de travail sont à la limite de l’insalubrité :
« Au départ, il y a eu en décembre une pétition adressée à la direction de la part de la majorité du personnel, pour réclamer de meilleures conditions de travail. Le bâtiment est délabré, les infiltrations d’eau sont récurrentes. Quand il pleut dehors, il pleut aussi à l’intérieur du magasin au point que certains devaient garder leur parapluie en rayon. Au sous-sol, nous avons eu droit depuis février à des remontées d’égouts plusieurs fois par jour. »
Après avoir d’abord refusé de faire quoi que ce soit, la direction a donné un aspirateur aux salariés... pour qu’ils puissent évacuer l’eau des sous-sols. Mais les remontées d’eau ont continué, sans parler des autres problèmes.
« C’est finalement un de mes collègues qui a dû venir avec ses propres outils pour ouvrir la grille et nous permettre de déboucher nous-mêmes les évacuations d’eau sur notre temps de travail (j’étais moi-même en heures supplémentaires à ce moment). Il y avait aussi une infestation de rongeurs qui remplissaient notre salle de pause d’excréments qui n’étaient jamais nettoyés. »
A ces conditions déplorables s’ajoute un sous-effectif chronique :
« Dans mon équipe, nous n’étions que quatre vendeurs pour gérer deux étages. C’était intenable et usant. Chaque fois que l’un d’entre nous prenait des vacances, nous étions forcés de reprendre ses heures et d’allonger nos journées de travail. »
Mobilisation et répression
En avril, les salariés ont fait grève une journée pour réclamer de meilleures conditions de travail. La réaction de la direction ne s’est pas fait attendre. Quatre des grévistes ont été convoqués pour un entretien préalable au licenciement, à peine quelques jours après la grève : « la répression syndicale était plus qu’évidente. Le seul point commun entre nous était d’avoir participé à la grève. »
Salomé et une autre vendeuse sont finalement licenciées pour « harcèlement » après une nouvelle journée de grève en mai. A ces licenciements abusifs s’ajoute une campagne permanente de calomnies et d’intimidation contre les militants syndicaux. La direction est même allée jusqu’à insinuer auprès des salariés que des syndicalistes de SUD « auraient payé l’inspection du travail pour obtenir un rapport favorable ».
Ces licenciements en série se sont produits alors qu’approchait l’élection des représentants du personnel au sein du Comité social et économique. L’objectif de la direction était clair : se débarrasser de toute présence syndicale dans le magasin, pour pouvoir continuer d’exploiter les vendeurs et vendeuses en toute tranquillité.
Aujourd’hui, la répression contre les vendeurs de Rougier & Plé continue. Sam, la déléguée syndicale du magasin, est menacée de licenciement. Des procès aux Prud’hommes ont été intentés contre la direction et un comité de soutien a été formé.
Cette situation est loin d’être une exception. Elle s’inscrit au contraire dans une vague de répression syndicale à l’échelle nationale, qui s’est particulièrement accentuée depuis les mobilisations contre la réforme des retraites. Dans le contexte de la crise profonde du capitalisme français, la classe dirigeante a besoin de réprimer la résistance des travailleurs pour pouvoir intensifier leur exploitation.
La lutte des travailleurs de Rougier & Plé est un exemple à suivre. Face à la classe dirigeante, nos seules armes sont notre solidarité et notre organisation. Pour défendre les travailleurs mobilisés contre la répression patronale, le mouvement ouvrier devrait prendre le problème à bras le corps et organiser une campagne générale sur le mot d’ordre « une attaque contre l’un d’entre nous est une attaque contre tous » !
Pour soutenir les grévistes de Rougier & Plé, vous pouvez faire un don à leur caisse de grève.