Après plusieurs mois de répression à Gaza et en Cisjordanie, l’insurrection se poursuit. Elle se poursuivra encore dans les mois à venir, avec la possibilité grandissante d’embraser la région tout entière. Dores et déjà, l’Intifada a eu des répercussions importantes à travers le monde arabe mais aussi – ce qui est d’une importance cruciale pour la suite des événements – au sein même d’Israël.
Le commandement militaire israélien a agi avec une brutalité caractéristique. Des tirs aux balles réelles pleuvent sur la jeunesse des territoires dits "autonomes", qui ne sont en réalité que des enclaves encerclées par l’armée israélienne. Des armes lourdes, des chars, des hélicoptères et des avions ont été utilisés sans retenue, blessant de 12 000 à 15 000 palestiniens et en tuant des centaines. Chaque jour apporte son lot de cadavres, pour la plupart ceux de jeunes gens délibérément ciblés et assassinés. Le pouvoir israélien cherche à démoraliser et à soumettre la jeunesse palestinienne en conjuguant répression féroce et blocus économique.
En Israël, Barak, Sharon, la presse et des rabbins hypocrites dénoncent tous les jours la "violence" des palestiniens. Mais toute l’histoire de la classe dirigeante israélienne démontre qu’elle n’a absolument rien contre la violence, du moment que c’est elle qui en conserve le monopole. L’État d’Israël s’est doté de moyens de semer la mort et la destruction incomparablement plus meurtriers que les armes dérisoires dont disposent les jeunes palestiniens.
Les insurgés palestiniens ont fait preuve d’un esprit de révolte et d’un courage extraordinaires. Certains reportages évoquent le soi-disant "fanatisme" des palestiniens, ou le "culte du sacrifice" qui se serait subitement emparé des jeunes, comme s’il s’agissait d’une ancienne coutume tribale refaisant mystérieusement surface. Or en fait, la détermination inébranlable dont les jeunes font preuve s’explique avant tout par la situation matérielle absolument invivable dans laquelle ils se trouvent. Qu’ont-ils à perdre ? Les conditions sociales et économiques sont semblables, pour beaucoup de palestiniens, à ce qu’ont connu les noirs d’Afrique du Sud dans les "bantoustans", sous l’apartheid. Les territoires "autonomes" ne sont en réalité qu’une immense prison, où l’appareil policier d’Arafat fait office de gardiens, cependant que l’armée israélienne patrouille autour des murs.
L’Intifada démontre la grande force inhérente aux mouvements authentiquement révolutionnaires. La tragédie de ce mouvement est qu’il ne s’est pas encore doté d’une direction et d’un programme politiques à la hauteur des opportunités qu’il a créées au cours de son développement. Cette direction naîtra, à terme, de l’expérience des palestiniens eux-mêmes. De nombreux jeunes palestiniens se considèrent comme des internationalistes et comprennent que la lutte pour leur émancipation nationale et la nécessité de renverser le capitalisme dans la région sont inextricablement liées. Cette prise de conscience est évidente, ne serait-ce qu’au vue de nos échanges de courrier avec le Syndicat des Étudiants Socialistes de Palestine, dont quatre membres ont été tués au cours des récents affrontements.
Le début d’une révolution
L’insurrection à Gaza et en Cisjordanie n’a rien d’une révolte éphémère. Elle est le début d’une révolution. L’issue de ce conflit est d’une importance absolument cruciale pour les Palestiniens, bien sûr, mais non seulement pour eux. La situation évolue très rapidement, et ouvre des perspectives révolutionnaires d’une portée immense à travers le Proche-Orient, le Moyen-Orient, en Afrique du nord et au-delà. Leur lutte est donc notre lutte. L’internationalisme tel que nous l’entendons ne saurait se réduire à de vagues appels à la solidarité. Il implique surtout l’ouverture d’une discussion fraternelle, franche et sérieuse, sur des questions de programme, de méthodes et de perspectives. C’est dans cet esprit que nous soumettons le présent article à la considération de nos lecteurs en France et au Proche-Orient.
La première condition de la réussite d’un combat consiste dans le fait de savoir distinguer ses alliés de ses ennemis. L’Intifada a beaucoup d’alliés. Ils se comptent en centaines de millions. Dans tous les États de l’Afrique de nord, allant du Maroc et de la Mauritanie à l’ouest, jusqu’en Égypte ; au Soudan et dans la péninsule arabique à l’est ; en Syrie, au Liban, en Jordanie, où les Palestiniens constituent la majorité de la population, l’ampleur et l’élan de la nouvelle Intifada a capté l’attention et à inspiré les travailleurs et la jeunesse. Opprimés, exploités et méprisés par les classes dirigeantes dictatoriales de leurs pays respectifs, ils se reconnaissent consciemment dans la lutte des Palestiniens. En Jordanie, le régime n’a pu survivre que par le massacre des Palestiniens perpétré en 1970. Les peuples arabes considèrent à juste titre les acteurs de l’Intifada comme les champions de leurs propres aspirations à une vie meilleure.
C’est en cela que consiste le facteur décisif qui tranchera d’une façon ou d’une autre le sort de l’Intifada dans les mois à venir. Si l’insurrection des Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie reste isolée, elle sera perdue, et ceci malgré l’héroïsme et la combativité admirables de ses participants. Il en découle que le seul programme qui puisse offrir un quelconque espoir de victoire est un programme internationaliste, c’est-à-dire une démarche qui vise consciemment à transformer les immenses réserves sociales qui, à travers le monde arabe, s’identifient à l’Intifada, en un soulèvement actif des peuples pour renverser leurs oppresseurs. Une fois mises en mouvement, ces réserves constitueraient une force absolument irrésistible, et rendrait possible, de façon immédiate et concrète, l’émancipation non seulement des Palestiniens, mais de tous les peuples au sud et à l’est du bassin méditerranéen.
Face à l’Intifada, il y a, certes, la puissance de la machine militaire israélienne. Mais la société israélienne n’est pas, contrairement à ce qu’expliquent ses dirigeants, un bloc homogène et uni. Bien au contraire, la société israélienne est profondément divisée. Les capitalistes israéliens exercent une pression constante sur les salariés pour porter atteinte à leurs rémunérations et à leurs conditions de travail. L’État d’Israël se qualifie de "démocratique" mais, dans la réalité, l’essentiel de la richesse nationale et le pouvoir politique sont détenus par une petite minorité de privilégiés, et des discriminations flagrantes en matière de droits civiques existent à l’égard des minorités nationales, qu’il s’agisse des travailleurs immigrés, traités comme des bêtes de somme, ou des juifs russes. En particulier, la loi officialise le mépris et des discriminations multiples à l’encontre les Palestiniens israéliens, qui brûlent d’amertume à l’égard du régime et qui se sentent totalement solidaires avec la cause de leurs frères et sœurs réfugiés et habitants des territoires "autonomes". Ceci est une réalité d’une importance stratégique majeure, voire déterminante, du point de vue des perspectives pour le soulèvement à Gaza et en Cisjordanie. La population d’origine palestinienne en Israël est le talon d’Achille de la classe dirigeante, un talon vers lequel les acteurs de l’Intifada, s’ils veulent rompre leur isolement et paralyser leurs adversaires, doivent immédiatement envoyer une flèche.
A partir de cette évaluation du contexte concret dans lequel se déroule l’Intifada et du rapport de forces entre les alliés potentiels du soulèvement et ses adversaires, il apparaît clairement que la cause de l’Intifada est loin d’être perdue d’avance, pour peu que ses acteurs réels – on ne parle évidemment pas ici d’Arafat et des ses lamentables acolytes diplomatiques, mais plutôt des jeunes et des travailleurs qui sont directement impliqué dans la lutte – prennent conscience de l’importance de mobiliser ces alliés et de mettre au point un programme qui puisse réaliser cet objectif. Ici nous avons une démonstration nouvelle et tout à fait éclatante de l’importance cruciale des idées, du programme et de la stratégie des dirigeants d’un mouvement révolutionnaire comme l’intifada. Sans une direction correcte, capable de guider le mouvement et de le rendre conscient de ses tâches, le plus audacieux des soulèvements ne saurait aboutir.
Le rôle de Yasser Arafat
Ici en France, si par malheur on devait dépendre uniquement des journaux télévisés pour s’informer sur le conflit, on pourrait facilement se faire l’idée que c’est Arafat qui dirige la révolte palestinienne, et que c’est à ce titre qu’il négocie avec Barak, Clinton, et demain Bush, pour résoudre les problèmes. La réalité est tout autre. Arafat a subi cette insurrection tout autant qu’Israël. Si les négociations à Charm-el-Cheikh, puis à Washington, n’ont pas abouti, ce n’est nullement le fait d’une quelconque intransigeance d’Arafat. Tout simplement, n’importe quel "accord" entre Barak et Arafat ne peut se conclure tant que le soulèvement se poursuit. Or, jusqu’à présent, Barak, Clinton et Arafat lui-même doivent se rendre à l’évidence que ce dernier est encore incapable d’arrêter le soulèvement. L’impuissance d’Arafat est une fonction croissante de la puissance de l’intifada.
Il faut se poser la question : pourquoi le soulèvement qui se déroule à Gaza et en Cisjordanie pose un tel problème aux autorités israéliennes ? La réponse est que, premièrement, elles craignent l’affaiblissement, voire le renversement d’Arafat, qui a pour fonction, suivant les accords d’Oslo et de Madrid, de maintenir l’ " ordre " dans les territoires prétendument autonomes et de veiller à ce que les intérêts d’Israël ne soient pas contrariés. Deuxièmement, les autorités israéliennes craignent une extension de la révolte au sein même d’Israël. Les participants à l’Intifada sont – et c’est compréhensible – plutôt sceptiques sur ce point. Mais pour s’en convaincre, il suffit de voir comment les ennemis de l’Intifada évaluent la situation. La consultation, entre autres, des dépêches de l’agence de renseignement Stratfor Global Intelligence, qui fournit des analyses géopolitiques aux gouvernements et aux responsables diplomatiques et militaires du monde entier, et particulièrement des États-Unis, s’avère très instructive.
Dans un bulletin de Stratfor publié le 10 novembre dernier, on peut lire ce qui suit : "Il semblerait qu’Arafat ait perdu le contrôle du Fatah. Par exemple, Marwan Barghouthi, qui est un dirigeant du Fatah en Cisjordanie et aussi commandant de la milice de Tanzim, a pris fermement position contre Arafat. Le 8 novembre, il a mis en évidence la rupture au sein du Fatah, en proclamant que l’Intifada se poursuivra "avec ou sans" Arafat. La scission est rendue de plus en plus évidente avec l’insurrection continue, dans les rues. Du coup, Israël change de stratégie, et s’efforce d’éliminer des membres du Fatah qui ne sont plus fidèles à Arafat. L’ironie de la situation, c’est que les attaques israéliennes en cours indiquent plutôt que les négociations [entre Arafat et les Israéliens] avancent. La précision des frappes israéliennes indique que les services de renseignement d’Arafat collaborent avec les forces israéliennes – suivant les accords conclus en Égypte – pour liquider les éléments qui persistent à promouvoir l’Intifada et qu’Arafat ne peut plus contrôler. L’essentiel, c’est qu’Israël peut aider à maintenir Arafat au pouvoir et poursuivre les négociations avec lui, ou alors le laisser tomber au profit des éléments radicaux et laisser se répandre l’Intifada à travers les territoires. Même si Israël est en train de se battre pour le compte d’Arafat, cela ne signifie pas que celui-ci n’a plus de problèmes. Au contraire, Arafat doit maintenant tenir ses engagements et obtenir la déclaration d’un État palestinien par le biais des négociations. Si Arafat réprime, ou aide [Israël] à réprimer, ceux qui dirigent l’Intifada, et ensuite échoue dans les négociations, il sera complètement discrédité."
Dans un autre bulletin du Stratfor, publié préalablement (le 18 octobre) nous pouvions lire : "La surprise, c’est que le Hamas n’est pas un problème. C’est plutôt la fracture apparue dans le Fatah qui en pose un. Grâce à la coopération, dans le passé, [entre Arafat et Tel-Aviv] les forces de sécurité palestiniennes et israéliennes sont bien renseignées sur les partisans du Hamas et peuvent les arrêter rapidement. ... D’autre part, il se peut qu’Arafat ait perdu le contrôle de Marwan Barghouthi. Si tel est le cas, alors Barghouthi doit être en tête de la liste des personnes recherchées par les forces de sécurité palestiniennes, et pourrait être arrêté prochainement. Au retour d’Égypte, en voyant que la violence se poursuivait, Arafat a exprimé son désarroi en disant que "tout ceci est contraire aux accords".
Enfin, le bulletin du 15 octobre indique on ne peut plus clairement que les meilleurs stratèges, parmi nos adversaires, prennent très au sérieux la menace d’une extension de la lutte à l’intérieur même de l’Etat d’Israël : "Nous nous trouvons désormais dans ce qui pourrait s’avérer être un scénario cauchemardesque. ... L’appareil militaire israélien craint justement ce scénario et a largement axé sa doctrine là-dessus. Le scénario se passe ainsi : Acte premier : un soulèvement éclate en Cisjordanie et à Gaza. Deuxième acte : le soulèvement gagne les citoyens arabes d’Israël. Éprouvée jusqu’à ses limites par la menace interne, l’armée n’est plus en mesure de faire face à une menace externe."
"Ce qui fait la différence entre les événements de ces dernières semaines et tout ce que nous avons pu connaître auparavant, c’est qu’on assiste à des violences considérables au sein même d’Israël, impliquant ses citoyens d’origine arabe. Ceci ne s’est pas produit dans les années 80. En fait, on n’a rien vu de semblable depuis la guerre d’indépendance de 1948. Répandus à travers le territoire national, les Arabes israéliens habitent dans la région d’Haïfa, alors que d’autres résident dans des villages côtiers et en Galilée. Un soulèvement conséquent des Arabes israéliens poserait un problème de sécurité incomparablement plus sérieux que tout ce qui pourrait se produire en Cisjordanie ou à Gaza. Et ceci ne serait qu’un début. Un soulèvement en Israël rendrait pratiquement impossible le déplacement de soldats et de fournitures militaires ..."
Naturellement, là où Stratfor parle de "violences", il faut entendre "mobilisation populaire". Ceci dit, si nous avons voulu citer assez longuement le contenu de tels bulletins, c’est qu’ils mettent en évidence avec une grande clarté les mécanismes par lesquels l’Intifada pourrait être victorieuse. Cette victoire, répétons-le, passe nécessairement par son extension dans le monde arabe et en Israël même, et dans un premier temps par le biais des jeunes et des travailleurs israéliens d’origine arabe.
L’ONU : une "solution" pour qui ?
Soit dit en passant, la cause des Palestiniens n’est jamais moins bien servie que par certains de ses "amis" qui, en France et ailleurs, posent le problème en termes de simple "rétablissement de la paix" et qui, le plus souvent, proclament à cette fin la nécessité d’une intervention de l’ONU. Arafat lui-même a demandé l’envoi de 20 000 soldats de l’ONU dans la région. Parmi les groupements en France qui agissent sur ce registre se trouvent certains groupements "trotskistes". Pauvre Trotsky ! Le grand internationaliste et dirigeant de la révolution russe se retournerait dans sa tombe s’il pouvait entendre ceux qui usent et abusent de son nom.
Qu’est-ce l’ONU, au juste ? Et quelles seraient les conséquences d’une intervention de l’ONU ? Les Nations Unies sont un forum représentant les différentes puissances impérialistes, dans lequel les États-Unis occupent une position prépondérante. A la limite, les Nations Unies peuvent contribuer à résoudre des questions secondaires dans la mesure où les grandes puissances se mettent d’accord. Et même dans ces cas, la "solution" apportée sera naturellement conforme à leurs intérêts propres. Si les enjeux en termes de souffrances humaines n’étaient pas si importants, on aurait envie de rire en écoutant ces intellectuels "pacifistes" et "trotskistes" qui, juste après avoir accablé les États-Unis pour son rôle néfaste au Proche-Orient, se tournent ensuite vers les Nations Unies ! Comme si les Nations-unies pouvaient imposer quoi que ce soit de contraire aux intérêts des États-Unis !
Pour l’instant, les États-Unis ne voient pas l’intérêt d’une présence militaire. La Maison Blanche mise sur l’essoufflement de l’Intifada et sur un rétablissement de l’autorité d’Arafat dans les territoires autonomes, favorisé, espèrent-ils, par l’assassinat des instigateurs de l’Intifada grâce aux renseignements fournis aux israéliens par Arafat. Serait ainsi écarté le danger d’une généralisation de l’insurrection. Si les "casques bleus" devaient un jour être envoyés sur place, ce serait naturellement pour poursuivre les mêmes objectifs. Quant à la France et aux autres puissances européennes, elles se déclareraient favorables à l’envoi d’une force militaire dans les heures qui suivraient une éventuelle décision en ce sens à Washington, mais pas avant.
Du point de vue des Palestiniens, une intervention des Nations Unies ne résoudrait strictement rien. L’idée plaît à Arafat, qui y voit un moyen de renforcer son régime discrédité et, sous la couverture d’une opération de "maintien de la paix", de porter un coup à ses adversaires. Actuellement, des militants jugés trop "radicaux" font l’objet d’un harcèlement et d’une répression implacables de la part du régime d’Arafat. Si l’insurrection devait s’essouffler, ces militants seraient en danger de mort. Rappelons que de nombreux jeunes qui étaient aux avant-postes de l’insurrection, en 1987, ont été incarcérés et assassinés par la suite. L’Autorité Palestinienne serait renforcée par la présence des casques bleus et confortée dans son rôle de pion d’Israël. La moitié du budget de l’Autorité Palestinienne provient de fonds israéliens. L’entourage d’Arafat, notoirement corrompu, se sert copieusement dans ces fonds pour son propre compte. Prôner une intervention des Nations Unies, c’est trahir l’intifada. Les Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza se battent pour libérer leur territoire de l’occupation israélienne, et non pas pour voir s’y installer 20 000 soldats aux ordres des États-Unis.
Seule l’extension du mouvement peut offrir une issue favorable à l’intifada. Un appel haut et fort en ce sens est indispensable. Il faut en appeler à la solidarité des Arabes israéliens, leur demandant de lancer immédiatement une grève générale illimitée pour la libération de tous les territoires occupés, pour mettre fin à la répression, en liant ces objectifs à leurs propres revendications en matière de droits, de salaires, de conditions de travail, et en mettant directement en cause la domination de la société israélienne par les grands capitalistes.
Une grève générale en Israël aurait un effet dévastateur sur le moral de la classe dirigeante, mènerait à une déstabilisation de l’armée et finirait certainement par entraîner la majorité des travailleurs israéliens. Mais il ne faut pas en rester là. Il faut dire la vérité aux peuples de tous les pays du Proche-Orient et du monde arabo-musulman en général, à savoir que l’insurrection ne saurait être victorieuse sans leur soutien actif, sans qu’ils se révoltent eux aussi contre le capitalisme et contre les régimes de leurs pays respectifs. A Gaza et en Cisjordanie, une défense sérieuse doit être mise en place pour faire face plus efficacement à l’armée de l’occupant. Les armes qui sont enfermées dans les locaux du Fatah et ailleurs doivent être distribuées au peuple. Par contre, les attentats aveugles et les actes individuels de vengeance contre des civils juifs doivent cesser. Les travailleurs et les enfants juifs ne sont pas l’ennemi. Il faut au contraire leur tendre une main fraternelle. Les "bombes humaines" dirigées contre eux font le jeu des vrais ennemis, qui s’en servent pour dresser tous les Israéliens contre l’intifada.
Il est également indispensable que les habitants des territoires "autonomes" s’organisent indépendamment du régime d’Arafat, en créant des instances représentatives, composées de délégués élus dans chaque localité, dans chaque entreprise, dans chaque unité militaire. Ceci aurait pour effet d’unir le peuple et de lui donner une voix qui puisse être entendue par-delà de celle des diplomates et arrivistes qui ne cherchent qu’à pactiser avec l’ennemi. Une instance réellement représentative du peuple puisque directement élue par lui et responsable devant lui ne manquera pas d’acquérir une autorité qui éclipserait rapidement le prestige artificiellement entretenu d’Arafat et de sa clique, et ouvrira la perspective d’une alternative au régime d’Arafat. Le temps presse. Si cette nouvelle Intifada reste isolée, elle est condamnée à terme. Par contre, son extension au-delà des frontières sur la base du programme dont nous avons défini ici les caractéristiques essentielles ouvrirait la possibilité de délivrer de l’oppression et de la pauvreté tous les peuples de la région, réunis dans une puissante fédération socialiste et démocratique.