Nous publions ci-dessous l’appel adopté par la coordination lycéenne et étudiante qui s’est réunie à Lille, les 1er et 2 avril. Nous ne sommes pas complètement d’accord avec tous les mots d’ordre. Mais l’appel à orienter le mouvement étudiant et lycéen vers le mouvement ouvrier est parfaitement correct, comme nous l’avons écrit dans un article publié samedi. Les propositions concrètes dans ce sens sont également justes. Il faut désormais les mettre en pratique.
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Pour un mouvement d’ensemble contre la précarité
Appel de la coordination de Lille, dimanche 2 avril 2006
Nous, étudiants et lycéens délégués de 114 établissements d’enseignement supérieur et de nombreux lycées mobilisés, réunis en Coordination Nationale, à Lille, les 1er et 2 avril 2006, réaffirmons notre détermination à construire un mouvement d’ensemble contre la précarité et continuer la grève et le blocage jusqu’au retrait de la Loi sur l’Egalité des Chances (LEC), dont le CPE est un amendement, et du CNE.
CPE, CNE, contrats seniors : leur volonté c’est d’étendre encore et de légaliser la précarité pour tous en mettant en place le contrat de travail unique. Chirac prétend avoir écouté nos attentes. C’est un mensonge. Le maintien de la période d’essai d’un an resterait inacceptable, car c’est un pas de plus dans ce sens.
Quant au licenciement, il ne serait pas plus justifié que pour un CNE : nous aurons seulement le droit d’entendre la « raison », valable ou pas, de rupture du contrat. Merci patron !
Aménagée ou pas, la logique de la LEC subsiste : travaille pour pas cher, et tais-toi ! Ni aménagements, ni négociations ! Retrait de la LEC, retrait du CNE !
Que Chirac ait promulgué cette loi n’a pas entamé notre détermination, bien au contraire. Les propositions de modifications de Chirac ne prouvent qu’une chose : il craint que notre mouvement ne s’étende encore. Nous allons lui répondre par un mouvement toujours plus fort, toujours plus étendu !
Cette nouvelle provocation, comme toutes les autres, ne fera que convaincre encore plus de salariés, de précaires, de chômeurs, de lycéens et d’étudiants de nous rejoindre dans la lutte. De Robien le sait bien, lui qui a donné l’ordre à la police de débloquer les lycées : il a soudé les profs et les élèves qui ont maintenu leurs piquets de grève, et notre réponse a été de bloquer encore plus de lycées, et même le pays tout entier. Les lycées ont déjà rejoint les universités. Dans bien des facs et des lycées, profs et IATOSS participent activement à la grève.
Les journées du 7 mars, du 18 mars, le succès historique du 28 mars, montrent que des millions de salariés sont disponibles pour lutter, reprennent confiance dans leurs forces, dans leurs possibilités de gagner.
L’autisme du gouvernement et de Chirac sur nos revendications, l’ampleur de la répression qu’il déploie contre le mouvement, et leur volonté de lier leur sort, à plusieurs reprises, au CPE (utilisation de l’article 49.3, promulgation de la loi...) les obligeront à partir en même temps qu’ils retireront leurs attaques.
Les journées d’action ne sont utiles que si leur objectif affiché est de construire la grève générale, seul moyen de faire reculer le gouvernement. C’est pourquoi nous appelons à la grève générale reconductible dès le 4 Avril. Nous sommes conscients des difficultés pour la construire. Le mouvement étudiant n’est pas parti d’un seul coup : ce sont d’abord les étudiants de Rennes qui ont fait le pari que leur grève ferait tâche d’huile et qui ont bloqué leur université, seuls pendant une semaine. Il en ira de même chez les salariés.
Nous allons donc contribuer, avec les secteurs les plus mobilisés du monde du travail, à faire en sorte que la date du 4 avril, proposée par la coordination nationale à Aix, retenue par les syndicats comme nouvelle journée de grèves et de manifestations, marque le début d’un mouvement de grèves reconductibles.
Nous nous engageons à soutenir le mouvement des salariés. Nous sommes disponibles pour toute action commune qui aide à construire la grève. Nous souhaitons que partout se tiennent des Assemblées Générales (AG), qui permettent de décider démocratiquement des moyens d’action et des revendications. Parce que la précarité, ce n’est pas seulement le CPE ou le CNE, nous nous engageons à soutenir toutes les revendications qui seront définies par les salariés en lutte, comme par exemple l’augmentation des salaires et la requalification en CDI de tous les emplois précaires.
Nous soutenons les appels des syndicats locaux à la grève reconductible dès le 4 avril et demandons à toutes les organisations de poser des préavis illimités, aussi bien au niveau local que national, et à s’engager réellement dans la construction de la grève générale jusqu’au retrait de la loi dite sur l’Egalité des Chances, le CPE et le CNE. Nous appelons à ce que la manifestation de Paris aille vers l’Assemblée nationale. Nous appelons les étudiants et lycéens à rencontrer les équipes syndicales de la ville ou du département pour proposer des actions communes, des AG communes et envisager toutes les possibilités de reconduction après le 4 avril.
Dès le mercredi 5 avril, nous appelons les étudiants et les lycéens à des journées d’actions dirigées vers les entreprises, en lien avec les salariés et leurs syndicats locaux : diffusions, blocages, occupations des usines et des bureaux. L’objectif est de soutenir les grévistes et de susciter des AG pour étendre le mouvement.
Jeudi 6 avril, nous appelons à manifester et à bloquer des principaux axes routiers ferroviaires.
Vendredi 7 avril, nous appelons à une journée nationale de mobilisation contre la répression, avec en particulier des rassemblements devant les tribunaux.
Pendant les vacances de Pâques, comme pendant les vacances de février, nous maintiendrons la grève et le blocage actif des universités et lycées.
Samedi 8 avril, nous appelons les organisations syndicales à coorganiser des manifestations de salariés, chômeurs, précaires, lycéens et étudiants.
Le mardi 11 avril, nous proposons à tous les grévistes salariés, lycéens et étudiants ainsi qu’à toute la population de manifester simultanément dans toutes les villes de France.
Tous ensemble, par la grève générale reconductible, nous allons gagner !
Lille, le 2 avril 2006