Dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale débattu en octobre au Parlement, le gouvernement affichait un objectif de réduction des dépenses de 21 milliards d’euros d’ici 2017. Le fameux « pacte de responsabilité et de solidarité » n’est rien d’autre qu’un plan d’austérité de 50 milliards d’économies sur les services publics, la santé et la Sécurité sociale. L’assurance maladie sera la plus touchée, puisqu’elle participera à elle seule à hauteur de 10 milliards d’euros. Quant à la branche famille, le gouvernement y prévoit 700 millions de coupes.
Après s’être attaqué aux retraites en rallongeant la durée de cotisation et en gelant les pensions de base pendant six mois, le gouvernement coupe dans les branches famille et maladie de la Sécurité sociale. De nombreux malades seront donc priés de rester chez eux en soins ambulatoires. La traque aux « inadéquations hospitalières » est lancée : il s’agit des lits jugés « occupés de manière non pertinente et non justifiée », comme si l’hôpital était une destination de rêve pour vacanciers !
La dette globale des organismes de la Sécurité sociale s’élève à 236,6 milliards d’euros, soit 11,7 % de la dette publique (2000 milliards). Le gouvernement explique le manque de recettes par un nombre insuffisant de cotisants. Le rapport masse salariale/bénéficiaires des prestations serait en déséquilibre, à cause du chômage de masse et du départ à la retraite de la génération du baby-boom. Telle serait l’origine du « trou de la Sécu ».
La fraude sociale est d’abord celle des patrons
Il est vrai que les cotisants sont moins nombreux depuis une vingtaine d’années. Le baby-boom et le chômage y jouent un grand rôle. Mais ce n’est pas la seule raison – tant s’en faut – du déficit de la Sécurité sociale.
Le travail dissimulé et le travail au noir dans les secteurs de la construction et du commerce explosent. Ils auraient doublé depuis 2007. Selon le rapport annuel sur la Sécurité sociale, les irrégularités et les fraudes patronales, toutes branches confondues, s’est établies à un niveau record en 2012, pour un montant estimé entre 20,1 et 24,9 milliards d’euros. Sans cette fraude aux prélèvements, le « trou de la Sécu » serait non seulement immédiatement résorbé, mais il y aurait un excédent pouvant aller jusqu’à 6 milliards d’euros par an !
Les différents gouvernements – de droite, bien sûr, mais aussi « de gauche » – ont refusé de s’attaquer aux fraudes patronales. Au contraire : les effectifs de l’Inspection du Travail ont été drastiquement diminués.
Ce n’est pas tout. À partir de janvier 2015, l’employeur d’un salarié au Smic ne paiera plus aucune cotisation patronale de Sécurité sociale à l’URSSAF, quel que soit l’effectif de l’entreprise. Or on estime que 13 % des salariés, soit plus de 3 millions, sont au Smic. L’exonération sera dégressive jusqu’à 1,6 fois le Smic. Au total, cela représentera 220 milliards d’euros de plus dans les caisses du patronat ! Et pendant ce temps, 33 % des Français renoncent à se soigner, faute de moyens.
Pour une santé 100 % publique !
La pression économique sur les salariés et leurs familles est intolérable. Or les grandes entreprises, les actionnaires et les grandes familles fortunées se portent très bien. La crise ne les empêche pas de réaliser des profits colossaux.
La santé est devenue un vaste marché où les groupes pharmaceutiques, les cliniques privées et les assurances dites « complémentaires santé » se taillent la part du lion. Les bénéfices engrangés sont monstrueux. Les entreprises cotées en bourse, comme Sanofi, ont clairement pour objectif de dégager des profits sur le dos de la population malade. Avec près de 33 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2013, Sanofi n’a aucun scrupule à licencier.
La santé ne devrait pas être un secteur marchand. Les ressources pour un système de santé sans contrepartie financière directe existent. L’accès gratuit à des soins de qualité est un droit que la société doit offrir à tous. La nationalisation de tout ce secteur – industrie pharmaceutique, assurances complémentaires, cliniques, etc. – sous le contrôle démocratique des salariés et de la population, n’est pas seulement légitime ; c’est une nécessité d’intérêt général.
Engluées dans un pseudo « dialogue social » avec le ministère de la Santé et le gouvernement, les directions des trois grandes fédérations syndicales – CGT, CFDT et FO – n’offrent ni perspective, ni plan d’action ou coordination nationale aux mouvements de lutte des salariés de la santé. En conséquence, des salariés du secteur, militants syndicaux et non-syndiqués, ont créé eux-mêmes une plateforme nationale de convergence des luttes regroupant une soixantaine d’établissements, des CHU aux maisons de retraite en passant par les hôpitaux de proximité et les établissements psychiatriques. Cette organisation des luttes à la base est exemplaire, mais elle doit d’urgence obtenir le soutien les directions fédérales et confédérales !